Home Exposition Vivantes !

Lumière sur les invisibles

Série À domicile, Olivia Gay © Juiien Damien

Elles sont boxeuses, marins-pêcheurs, exilées, aides-soignantes… Soit autant de femmes qui se battent au quotidien mais qu’on ne voit pas, ou si peu. Cette sélection d’images réalisées par huit lauréats de la “Grande commande pour le photojournalisme”, lancée en 2021 par le ministère de la Culture, offre un regard kaléidoscopique sur ces “invisibles”, et dézingue bien des clichés. 

En France, jusqu’en 1963, elles furent interdites (par la loi Colbert) de monter à bord de navires de pêche. Dans la série Les eaux-fortes, Julie Bourges documente justement le quotidien de quatre femmes marins-pêcheurs d’aujourd’hui. Saisies dans le feu de l’action, des côtes bretonnes à la méditerranée, ses images montrent des héroïnes du quotidien bravant les éléments et, surtout, les préjugés, qui ont la peau dure dans ce monde masculin… Voici l’une des grandes réussites de cette exposition : Vivantes ! pose le regard là où il s’attarde rarement, et c’est souvent bouleversant. En témoignent les sublimes tableaux photographiques d’Olivia Gay, immortalisant le travail d’aides-soignantes qui accompagnent les derniers jours de personnes âgées, à leur domicile, ou encore les journées d’Amandine, dans cette campagne de la France dite périphérique. « Elle a aujourd’hui 25 ans mais a l’impression d’en avoir déjà 40 », souligne Ulrich Lebeuf, qui la suit depuis son adolescence, sans misérabilisme et avec une sincère admiration. Pour cause, la jeune femme s’occupe de sa mère souffrant d’addictions, de son fils de quatre ans, cumule deux emplois, des études de lettres modernes par correspondance… et nous donne une sacrée leçon de courage.

Et la lumière fut

Dans un registre plus joyeux, mais tout aussi iconoclaste, Stayin’ Alive de Julie Glassberg révèle des “seniors” plutôt énergiques, loin de cet habituel regard chargé d’empathie – voire infantilisant. Ses photos montrent le désir, l’amour ou l’envie de s’amuser qui animent des personnes âgées, maquillées et apprêtées pour un bal ou un thé dansant… Au dernier étage du Colysée de Lambersart, l’installation de Mercedes Klausner offre enfin une superbe allégorie de “l’invisibilisation” des femmes. À travers son “filtre magique”, l’Argentine réhabilite des autrices, artistes ou scientifiques effacées de l’Histoire, grâce à un habile procédé. Plongées dans la pénombre, des plaques de verre sur lesquelles la plasticienne a gravé leur portrait attendent d’être éclairées par la lampe de nos téléphones. Ces visages oubliés apparaissent alors sur le mur, jaillissant littéralement de l’ombre pour briller en pleine lumière…

Julien Damien / Photo : Série À domicile, Olivia Gay © Juiien Damien
Informations
Lambersart, Le Colysée

Site internet : http://www.lambersart.fr/

07.09.2024>08.12.2024mer > dim : 13h-18h, Gratuit
Articles similaires