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Un autre regard sur la mode

Chris, Man About Town, #9, 2011, mannequn : Chris Beek (c) Willy Vanderperre

Ses images sont publiées dans des magazines comme, i-D, Perfect ou Vogue et servent des campagnes pour des marques prestigieuses telles Prada ou Dior. Le photographe Willy Vanderperre est mis à l’honneur dans sa ville, au MoMu d’Anvers, lors d’une exposition éclairant sa fascination pour la jeunesse, qui l’inspire depuis trente ans. L’occasion de découvrir une œuvre singulière, oscillant entre l’ombre et la lumière, romantisme et inquiétante étrangeté. Il nous en dévoile les contours.

Comment avez-vous réagi à cette proposition du MoMu ? J’ai tout de suite été assez excité. C’est ma première exposition ici, cela se passe dans ma ville, et j’ai trouvé que c’était aventureux de leur part. En même temps, quand on pense à un musée, on a tout de suite en tête des images du passé, une dimension chronologique. Or, si je ne suis pas très jeune, je ne suis pas non plus si vieux ! Le défi était donc de compiler des choses nouvelles et anciennes. Nous nous sommes penchés sur les archives pour créer un dialogue entre mes photos d’aujourd’hui et celles d’hier, afin de montrer mon évolution.

Vous balayez donc toute votre carrière ? Il y a tout de même un focus sur Anvers et le travail que nous avons accompli à trois, avec le créateur Raf Simons et mon mari, Olivier Rizzo, qui est styliste. On a commencé à collaborer avec Raf dans les années 1990. C’est aussi le moment où j’ai effectué mes premiers pas de photographe. C’était l’époque grunge, un moment de rupture avec les années 1980. Martin Margiela était en train de chambouler la mode, c’en était fini du glamour. On peut constater aussi notre obsession à tous les trois pour la jeunesse. D’ailleurs, cette exposition s’adresse aussi à ce public, et on va essayer de la prolonger à travers des événements.

Daa, Dust, #13, 2018. Mannequin : Daan Duez (c) Willy Vanderperre

Daa, Dust, #13, 2018. Mannequin : Daan Duez (c) Willy Vanderperre

Justement, comment avez-vous débuté votre carrière ? En fait, j’ai commencé des études à l’Académie de mode d’Anvers en 1989. Au bout d’un an, j’ai changé pour la photo. C’était une époque où l’on comprenait qu’une photo de mode pouvait aussi être une photo d’art. On a commencé par shooter des jeunes à Anvers avec Olivier et Peter Philips. Raf proposait lui une mode innovante, donc on utilisait ses vêtements. On a réalisé nos premiers clichés un peu naïvement, avant de les envoyer à quelques magazines. Cela a bien fonctionné, et un magazine comme i-D m’a soutenu dès mes débuts. En 1999, on a effectué ce shooting avec un Mickey Mouse peint sur le visage du mannequin Robbie Snelders, et cette image est devenue iconique. À partir de là, j’ai travaillé pour de grandes marques.

Robbie, V, #0, 2019. Modèle : Robbie Snelders © Willy Vanderperre

Robbie, V, #0, 2019. Modèle : Robbie Snelders © Willy Vanderperre

D’où vient l’inspiration pour un shooting ? De partout, y compris de la conversation que nous avons en ce moment. Parfois c’est une image, un film, un événement qui se passe dans le monde.

Avez-vous aussi des muses, des mannequins fétiches ? Il y a Clément Chabernaud, que j’ai commencé à photographier quand il avait 15 ans. J’aime aussi beaucoup Anok Yai et puis Natasha Poly, qui a réalisé avec moi ses premières images. Je suis assez fidèle, et obsédé par cet esprit que l’on garde et qui fait que l’on reste toujours jeune. C’était le cas pour Iris Apfel, qui nous a quittés cette année à l’âge de 102 ans. Tous ces jeunes, ces modèles, sont des muses. J’ai beaucoup de respect pour les mannequins, ils sont tous inspirants.

Combien de vos œuvres verra-t-on dans l’exposition ? Entre 180 et 200. Il y aura aussi des formats atypiques. C’est une façon de poser cette question : à partir de quand une photo devient-elle une œuvre d’art ? Quand elle est grande et encadrée ? Si elle est imprimée sur un t-shirt, ça en est aussi ? Il y aura également des éditions limitées proposées à la vente, dont les bénéfices seront reversés à une association.

Pouvez-vous nous parler du parcours ? Avec Romy Cockx, ma co-commissaire, nous voulions esquiver l’aspect chronologique et garder une forme d’énergie. Dans chacune des sept salles une image sert de fil directeur. On a aussi évité de donner un début et une fin à l’exposition, car je suis encore très jeune !  Mon film, Heartlands, sera diffusé et il y aura la possibilité pour les visiteurs de scanner un QR code à l’entrée de l’exposition, renvoyant à une playlist m’accompagnant quand je travaille. Elle sera renouvelée toutes les deux semaines. Au moins 80% des gens qui pousseront la porte du MoMu ne me connaîtront pas, je veux les inviter dans mon univers.

Rejoice, Dust, #24. 2024. Mannequin : Rejoice Chuol (c) Willy Vanderperre

Rejoice, Dust, #24. 2024. Mannequin : Rejoice Chuol (c) Willy Vanderperre

Propos recueillis par Marine Durand / Photo : Chris, Man About Town, #9, 2011, mannequn : Chris Beek (c) Willy Vanderperre
Informations
Anvers, MoMu

Site internet : http://www.momu.be/

27.04.2024>04.08.2024mar > dim : 10h-18h, 12/8€ (gratuit -18 ans)
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