James Barnor
Retour sur images
Quel artiste peut s’enorgueillir d’avoir marqué son époque, tant par sa créativité que ses innovations techniques ? À 94 ans, le photographe ghanéen James Barnor continue d’inspirer la jeune génération. Une bonne raison de se plonger dans son oeuvre, à travers une rétrospective au Foto Museum d’Anvers.
Une jeune femme noire, robe courte turquoise et coupe sixties, plante son regard vers l’objectif. Dans les mains, à ses pieds, des bidons rouges, roses, vert tilleul, répondent chromatiquement au mur devant lequel elle pose, et à des stores siglés Agfa. « Ce cliché de James Barnor, pris au Ghana vers 1970, est pour moi l’un des plus forts de l’exposition. La composition est superbe ! », s’exclame Pamela Peters, conservatrice au musée de la photographie (FoMu) d’Anvers. C’est en découvrant un accrochage aux Rencontres d’Arles 2022, consacré au travail de l’Africain, que la commissaire a eu l’idée de ce focus. Il faut dire que l’homme, né en 1929 à Accra, la capitale ghanéenne, où il ouvre à 20 ans son premier studio photo, n’a eu de cesse de parcourir le monde pour nourrir son art.
Around the World
L’artiste crapahute à Londres, où il immortalise la diaspora noire à partir de 1959. Puis à Mortsel, près d’Anvers, où il séjourne quelques mois une décennie plus tard. C’est là qu’il découvre le procédé unique de développement d’Agfa-Gevaert. De retour à Accra en 1970, il ouvre le premier laboratoire de photos couleur pour capter l’esprit de l’époque… Cette exposition retrace donc la trajectoire d’un pionnier de l’argentique, attentif aux évolutions techniques de sa discipline.
Le révélateur
Les clichés, en noir et blanc ou en couleur, démontrent au fil de la visite l’influence artistique et journalistique de James Barnor. Il fut le premier photoreporter ghanéen reconnu dans son pays. Il saisit ainsi la beauté des femmes noires, dans des scènes de rue emplies de joie au Ghana, ou des portraits glamour destinés aux couvertures de magazines. Dans une scénographie à la fois épurée et colorée rappelant l’esthétique d’un studio, c’est enfin la fibre musicale de Barnor qui se révèle. En effet, ses images des figures du courant Highlife, devenues des pochettes de disques iconiques, complètent le profil d’un touche-à-tout, et surtout d’une légende de la photo.