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I am the Highway (c) Henry Flores

Né en Équateur voici 33 ans, Henry Flores s’est révélé avec ses collages digitaux aux couleurs vibrantes. Les compositions de ce graphiste sud-américain marient des portraits avec une faune et une flore hétéroclites, et affichent une petite particularité : elles ont été réalisées avec l’aide de l’intelligence artificielle – mais n’ont rien de superficiel, bien au contraire. Entretien avec un artiste inspiré.

Comment décririez-vous votre travail ? C’est du collage éditorial, largement utilisé dans les magazines de mode. Ce type de composition met l’accent sur les visages de modèles féminins, les figures découpées et mélangées avec d’autres éléments, comme les plantes et les oiseaux. Cette pratique est entrée dans ma vie d’adolescent, quand j’avais mon groupe de musique punk et qu’on réalisait nous-mêmes les pochettes de nos singles. Vous connaissez sans doute cette culture du bricolage, à l’époque de MySpace, où l’on téléchargeait notre musique et nos couvertures d’albums. C’est à travers le collage que je faisais passer mes messages de rébellion, vers 20 ans, quand je baignais dans le monde du fanzine et des stickers. Puis j’ai vieilli et mes centres d’intérêt ont changé. Je me suis alors tourné vers le style plus minimaliste que vous pouvez découvrir sur mes réseaux sociaux, mais ma technique est restée la même.

Votre esthétique semble aussi reprendre les codes de la publicité, avec ces visages très travaillés, retouchés… Oui, cela fait plusieurs années que je peaufine mon style. La mode, la publicité et le portrait convergent dans mes créations. Au fil du temps j’ai perfectionné ce langage visuel.

Roots (c) Henry Flores

Roots (c) Henry Flores

Pourquoi vous concentrez-vous sur le portrait ? Parce qu’il m’importe de montrer le regard des gens, cette partie du corps humain transmet beaucoup d’émotions. Un regard profond peut nous mettre à l’aise ou au contraire nous embarrasser, c’est très intéressant.

Vous semblez avoir des thèmes de prédilection : la nature, les oiseaux… Oui, car cela fait partie de mon quotidien. J’habite dans une ville située sur la côte équatorienne qui s’appelle Portoviejo, où l’on rencontre beaucoup de végétation, différents types d’arbres et plantes, et la plage ne se trouve qu’à 15 minutes. C’est donc ma façon de glisser un peu de moi dans mes dessins.

Cyber Punk (c) Henry Flores

Cyber Punk (c) Henry Flores

Comment choisissez-vous vos couleurs ?  En fonction de mes humeurs. Les bons jours j’utilise des couleurs vives et pop, les mauvais jours je me sers des teintes plus foncées, comme le gris ou le marron.

Concrètement, comment travaillez-vous ? J’aime écouter de la musique et me balader sur le web, c’est comme si je connectais mes émotions et mon inspiration. Et j’adore aussi manger de la glace au chocolat ! Sinon, ma façon de choisir les portraits a changé au fil du temps : avant je sollicitais des photographes pour qu’ils m’autorisent à utiliser leurs clichés. Mais maintenant, avec l’intelligence artificielle, je façonne mes propres portraits. Cela me donne la liberté de créer le type de visage auquel je pense avant de concevoir l’image sur ordinateur. C’est la même chose avec les ressources que j’utilise dans mes créations comme les plantes, les fleurs et les animaux. Je réalise tout cela avec l’intelligence artificielle, l’édite et effectue la composition via Photoshop.

Soul Dystopia (c) Henry Flores

Soul Dystopia (c) Henry Flores

Quelles sont vos influences artistiques et où trouvez-vous l’inspiration ? J’aime beaucoup la manière dont l’illustratrice américaine Jessica Walsh utilise la couleur. J’apprécie aussi la géométrie du courant Bauhaus, ou encore regarder les défilés Gucci et les visages sans expression des mannequins. Les chansons ou la nourriture peuvent aussi m’inspirer des émotions.

Quels sont vos projets ? En ce moment j’effectue des recherches sur la dystopie et l’intelligence artificielle. J’ai l’intention de monter une exposition de mes collages autour de ce concept. J’aimerais également voyager, peut-être l’an prochain, et montrer mon travail à l’étranger.

Propos recueillis par Marine Durand // Photo : I am the Highway (c) Henry Flores
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