Urbain.es
La voie est libre
Vous avez aimé Street Generation(s) ? Alors vous adorerez Urbain.es. Après le succès d’une première exposition célébrant 40 ans d’art urbain, en 2017, la Condition Publique remet le couvert. Ce nouveau parcours interroge cette fois la place de la femme dans la ville, toujours sous le regard avisé de Magda Danysz. La célèbre galeriste réunit à Roubaix oeuvres iconiques et créations in situ, signées d’une vingtaine de street artistes du monde entier, et pour qui l’engagement n’est pas un vain mot.
Qu’en est-il de la représentation de la femme dans l’espace public ? Vaste question à laquelle s’attaque cette exposition, dont la première partie pose des bases historiques. « À l’origine du graffiti, dans les années 1970-80, le regard porté sur la femme est d’abord très caricatural : elle est en général dévêtue, avec une grosse poitrine et de grosses fesses », commente Magda Danysz, la commissaire. Le milieu est alors très masculin, voire machiste, mais ces dames ne sont pas en reste. Lady Pink, présentée comme « la première graffeuse », se fit un nom dès les années 1980 à New-York. En France, on citera Miss. Tic et ses pochoirs poétiques (“J’ai du vague à l’homme”) ou encore Miss Van, connue pour… ses plantureuses pin-up.
La rançon de la gloire
L’aube des années 2000 marque un premier tournant, d’un point de vue formel et même conceptuel. Le Français Zevs (prononcer “zeus”) commet un coup d’éclat retentissant, un sacré pied de nez à la chosification de la femme. « Nous sommes sur la place principale de Berlin, Alexanderplatz, et il y a cette énorme publicité Lavazza, une bâche de plus de 15 mètres de haut qui figure une mannequin quasi nue, pulpeuse, son intimité simplement recouverte par le logo de la marque… Bref, elle est présentée comme un objet ». Une nuit, Zevs va patiemment la découper au cutter et… la kidnapper. À la Condition Publique, on découvre l'”otage” originale, ainsi que la vidéo qu’il a tirée de cet enlèvement – et ses demandes de rançon.
État des lieux
Pour autant, Magda Danysz se défend d’avoir monté une exposition féministe. « Tous les artistes réunis ici ne sont pas spécialement focalisés sur la question du genre, même si leur travail recouvre des enjeux qui l’interroge, assure-t-elle. Rappelons qu’être “urbain”, c’est également respecter les autres, être attentif à son environnement et plus généralement à la place de chacun dans la cité ». Surtout, il s’agit de révéler la diversité de pratiques recouvrant le street art, entre abstraction (Maya Hayuk), sculptures hyperréalistes (Mark Jenkins et Sandra Fernandez), land art (Saype) et même phrases ou citations. Surnommé le “Banksy des mots”, l’Écossais Robert Montgomery présente, sous forme de LED ou lettres en feu, des textes poignants (“l’amour est le temps qui rêve pour toujours”) empruntant aussi bien à Sylvia Plath qu’à Guy Debord. Plus qu’une exposition donc, une véritable agora visuelle.
A LIRE ICI : YZ, FEMME PUISSANTE
A LIRE ICI : SAYPE, LA COURS DES GRANDS
Site internet : http://www.laconditionpublique.com/
mercredi > dimanche, 14h > 18h