Aline Bouvy
L'insolente
Transgression, humour… et sexualité débridée. Au MACS, Aline Bouvy envoie valser le bon goût et les conventions lors d’une maraude joyeusement borderline. À travers Cruising Bye, la plasticienne belge imagine un parcours sous forme de cabaret déjanté, du genre politiquement incorrect. Où l’on croisera des policiers très coquins, des sorcières sous belladone ou des chiens errants un poil libidineux. Âmes sensibles…
Adeptes des discours policés et des ambiances “bon chic bon genre”, passez votre chemin. Si vous aimez être bousculés par contre, alors vous êtes au bon endroit. « La démarche d’Aline Bouvy flirte avec le mauvais goût, la crudité, confirme Denis Gielen, le directeur du MACS. Elle s’intéresse aux tabous moraux, donc ce qui a trait au sexe, au corps et à ses fluides, travaillant avec des matériaux parfois dépréciés ». Sa propre urine, par exemple, avec laquelle elle lie ses plâtres, ou qu’elle représente en jets avec des grands néons jaunes façon “golden shower” – on vous expliquera plus tard. Cette position un brin trash n’a rien d’innocent. À l’ère de la fluidité des genres, il s’agit de rudoyer la bien-pensance, l’hétéronormativité et le patriarcat. En somme, de contester toute forme d’entrave au désir, dans une ode décomplexée à la liberté.
Dure à queer
Lors de cette «parade sauvage », on admire par exemple des sculptures de policiers androgynes dénudés sous leurs képis et gilets pare-balles, dans des postures érotisées convoquant l’imagerie queer, voire SM. « Elle dépouille ces corps de leur uniforme autoritaire, mais c’est réalisé habilement, avec humour, un sens certain du grotesque et de la parodie », commente Denis Gielen. Pendant ce temps-là, au sol, de petites voitures automatiques traquent les visiteurs trop pudibonds, comme une maraude qui aurait dégénéré. « Finalement, l’exposition est une sorte d’opéra-comique, un cabaret déjanté. Aline Bouvy n’est pas une donneuse de leçon ni une activiste. Elle est avant tout insolente ». Et ne s’interdit rien, renversant par exemple des urinoirs publics, par essence dévolus aux hommes, pour leur donner l’aspect de vulves, ici accrochées au mur comme autant d’éléments architecturaux – non, Marcel Duchamp n’est pas loin… Après avoir croisé quelques canidés se léchant les parties intimes sans pudeur (ni laisse), on aperçoit de gigantesques pieds posés sur le sol, à flanc de mur, tandis qu’un gros piercing traverse la brique, métamorphosant le musée lui-même en corps vibrant.