Rétrofutur
Le passé a de l'avenir
Le futur, c’était mieux avant ? Peut-être bien. À l’heure de l’urgence climatique, cet ouvrage puise dans le passé pour répondre aux enjeux écologiques de demain. Redécouvertes par un collectif de “paléochercheurs” (artistes, designers, ingénieurs ou simples curieux), ces inventions oubliées pourraient bien apporter des solutions à la crise énergétique que nous traversons. Astucieuses, parfois farfelues mais toujours “propres”, celles-ci utilisent essentiellement les rayons du soleil ou la puissance du vent et des marées pour imaginer une société post-carbone, de plus en plus inéluctable…
D’abord, battons une idée en brèche : non, le progrès n’est pas forcément linéaire. Il serait plutôt une succession de bifurcations et d’allers-retours. Par exemple, saviez-vous que la toute première voiture conçue par Ferdinand Porsche, en 1891, était électrique ? Que le covoiturage a déjà connu son heure de gloire au xxe siècle ? En l’occurrence aux États-Unis, en 1939, lorsqu’il fallut réserver l’essence aux véhicules militaires (« lorsque que tu conduis seul, tu conduis avec Hitler ! ») puis en 1974 pour contrer l’embargo pétrolier. À chaque fois le concept fut abandonné suite à la reprise du cours des énergies fossiles, qui régule donc celui des renouvelables…
Des inventions qui ont du chien
Cette deuxième édition de Rétrofutur exhume ainsi une soixante d’innovations boudées en leur temps, empêchées par l’or noir coulant à flots ou, simplement, les possibilités techniques de leur époque. Certaines prêtent à sourire, comme le “cynophère” de M. Huret (1875), soit un tricycle actionné par la force motrice de deux chiens courants dans de grandes roues pour hamsters. D’autres s’affirment comme des modèles de “low-tech” (voire de bon sens), à l’image des semelles-bouillottes de Lavoisier ou des tables thermiques japonaises (ou kotatsu), qui réchauffent seulement une partie du corps plutôt que toute la pièce.
Obsolescence déprogrammée
Outre l’ampoule d’Adolphe Chaillet, qui brille sans discontinuer depuis 1901 dans la caserne californienne de Livermore (grâce à son filament en carbone, plutôt qu’en tungstène), certaines de ces trouvailles incitent à la réflexion. C’est par exemple le cas du bacille Perfringens. Découvert en 1947 par Jean Laigret (l’inventeur du vaccin contre la fièvre jaune), ce microbe fabrique du pétrole en transformant des déchets organiques, et n’a bizarrement jamais connu de développement industriel. Pourtant, selon nos paléo-chercheurs, « la fermentation d’une tonne de vieilles huiles organiques est susceptible de produire 800 litres de pétrole brut et 140 mètres cube de gaz ». Mais serait-ce vraiment une bonne idée de lancer la “production bio” d’une énergie polluante ? Vaste question.
À lire / Rétrofutur, une autre histoire des innovations énergétiques, ouvrage collectif dirigé par Cédric Charles, Thomas Ortiz & Eric Dussert (Buchet-Chastel), 224p., 28€, buchetchastel.fr