Alexis Le Rossignol
Drôle d’oiseau
Vous aimez les rouleaux de jambon et les blagues absurdes ? Ça tombe bien, Alexis Le Rossignol aussi. Auréolé d’un flegme désarmant, qui fait son succès dans La Bande originale sur France Inter, celui qu’on surnommait ” El Francès” au Mexique présente son nouveau spectacle, Le Sens de la vie. Ce (presque) quadragénaire à l’humour décalé a longtemps voyagé avant de poser ses bagages pour se consacrer au stand-up. À l’occasion de son passage au Splendid, il nous raconte sa drôle de vie.
Vous avez été un grand baroudeur, n’est-ce pas ? Effectivement, j’ai vécu au Mexique pendant sept ans. Je suis tombé amoureux de ce pays, j’avais l’impression que tout était possible là-bas, alors qu’en France on avait des barrières. Auparavant, j’étais allé en Chine avec un copain, durant un an… Mais je voyage moins aujourd’hui, car j’ai décidé de ne plus prendre l’avion. Et puis je ne ressens plus cette quête consistant à parcourir le monde pour se trouver.
Comment avez-vous découvert le stand-up ? Dans un bar, au Mexique. Je buvais une bière et puis il y a eu un spectacle de stand-up. J’ai eu une révélation. À l’époque, je tenais une petite crêperie parce que tous mes copains mexicains me disaient : « T’as qu’à vendre de la bouffe ». Depuis le film Ratatouille, pour eux tous les Français savent cuisiner ! Mais je me suis vite aperçu que ce n’était pas pour moi.
Comment s’est déroulée votre première scène ? Quand j’ai commencé en 2013, le stand-up était complètement nouveau au Mexique. Du coup, j’ai rejoint des humoristes locaux. On écrivait ensemble, pour mieux convaincre le public. J’ai fait mes premiers pas dans une pizzeria. La plupart des gens me tournaient le dos parce qu’ils mangeaient, et les autres avaient l’air de penser : « C’est nul ce que tu dis ». Je ne me suis pas rendu compte sur le moment que c’était un bide. Ça m’a vachement plu, j’avais juste envie de recommencer.
À quoi votre carrière ressemblait-elle là-bas ? J’étais le Français au Mexique. Pour mon premier sketch, je portais une marinière et un béret, c’était un peu clownesque ! Ça m’a permis d’obtenir une petite notoriété, et même quelques passages à la télé. Mais j’ai voulu dépasser la caricature. J’ai donc travaillé mon écriture.
En France reveniez-vous à la case départ ? Oui, ici j’ai commencé par traduire mes textes, mais ça ne marchait pas du tout. La blague n’avait plus le même effet. Alors j’ai tout repris à zéro. Sur les plateaux les gens ne me connaissaient pas, mais avec trois ans de stand-up dans les pattes j’étais à l’aise sur scène. Et ça change tout.
Comment qualifieriez-vous votre humour ? J’affiche une forme de nonchalance tout en portant un message. Ce n’est pas frontal. Je raconte des histoires en m’appuyant souvent sur la famille et l’enfance, avec un brin de nostalgie. Je reviens aussi sur les voyages et développe des choses assez absurdes. En particulier lorsque je parle de recettes de cuisine. Les gens disent que je suis le seul à écrire des sketchs sur du pot-au-feu. Et c’est assez plaisant de rire avec des phrases comme “carotte de sable ou carotte de terre ?”
Vous vous inspirez des choses du quotidien… Un peu, mais je peux aussi aborder des faits de société. Dans mes spectacles il y a pas mal de choses vécues, notamment pendant mes voyages : j’évoque mon court passage en prison au Mexique ou mon expérience avec une crêperie. Je souffle le chaud et le froid, mais à aucun moment ce n’est moralisateur. On peut rire de sujets comme l’écologie sans donner de leçons.
Oui, vous êtes assez concerné par la question environnementale, et avez même inventé un mot, la “flexi-écologie”. De quoi s’agit-il ? J’en ai un peu marre des faux discours, nous sommes entourés de “flexi-écolos”, c’est-à-dire des gens qui prétendent ne plus prendre l’avion, par exemple, mais s’il y a un petit vol pas cher pour Prague, ils ne vont pas se priver !
De quoi parle votre nouveau spectacle, Le Sens de la vie ? De tout sauf du sens de la vie. Le jour de mon trente-neuvième anniversaire quelqu’un m’a dit : « L’année prochaine, tu seras plus près de 60 que de 20 ans ». Je me suis demandé comment traiter cette information. Depuis, j’essaye d’aborder la question du temps de manière sereine et drôle. C’est vrai, lorsqu’on vieillit le champ des possibles se rétrécit… Mais en même temps, on a suffisamment d’expérience pour se concentrer sur les meilleurs moments à vivre.
Que verra-t-on sur scène ? Je démarre assis, comme à la radio, à rebours des entrées de stand-up typiques, du genre : « Ouais ! Comment ça va ?! ». Je suis posé derrière ma table, je discute avec les gens… En tout cas j’ai hâte de présenter ce nouveau spectacle. Surtout dans le Nord où il se passe toujours un truc, ça va être chouette !
Quels sont vos projets ? J’ai publié un roman il y a quelque temps, je souhaiterais m’y remettre ! J’ai aussi écrit un conte pour enfants qui a été joué à la Maison de la Radio, adapté et mis en musique par l’Orchestre national de France. Pourquoi pas en faire un bouquin, et peut-être même une tournée pour les gamins ? J’ai aussi des idées de séries, j’aimerais bien passer un peu devant la caméra. Mais si ça ne se fait pas, ce n’est pas grave !