Ernest Pignon-Ernest
Tête d'affiche
Des silhouettes envahissant sans autorisation les rues des grandes villes. Des dessins engagés, défendant les opprimés. Vous aurez sans doute reconnu… Banksy ? Raté. Il s’agit d’Ernest Pignon-Ernest. Bien avant notre vandale millionnaire, le Français fit parler les murs pour dénoncer les maux de ce bas monde. Initiée par le Botanique, cette rétrospective célèbre un pionner du street-art.
Né à Nice en 1942, issu d’une famille modeste, Ernest Pignon-Ernest apprit le dessin en autodidacte. Il se rêva d’abord peintre, mais abandonna l’idée suite à la découverte de Guernica. « Il estima qu’il n’y avait plus rien à ajouter », raconte Roger-Pierre Turine, commissaire de cette exposition. “EPE” descendit alors son art dans la rue. Son premier fait d’arme remonte à 1966, dans le Vaucluse. En réaction à l’installation de silos de missiles nucléaires, il bombarde les environs de l’ombre d’un homme carbonisé par un éclair atomique. S’ensuivront cinq décennies de militantisme artistique.
A hauteur d’homme
Ernest Pignon-Ernest choisit ses lieux d’intervention en fonction d’un événement ou d’un personnage. « Il travaille toujours la nuit, de façon sauvage. Il réalise ses sérigraphies chez lui puis colle ses affiches partout en ville. Le lendemain, il les photographie ». Généralement, il s’agit de silhouettes grandeur nature comme ces résistants abattus dans les ghettos de Soweto, ou ces pauvres hères coincés dans des cabines téléphoniques à Paris ou Lyon, symboles de la solitude urbaine. Citons aussi Pasolini, immortalié dans les rues de Rome en 2015 à la manière de La Pietà de Michel-Ange. Ici, le cinéaste assassiné porte son propre cadavre à bout de bras… Le trait est académique, lisible par tous, « à la manière des peintres de la Renaissance ». Au Botanique, on découvre ses dessins préparatoires, clichés, sérigraphies originales ou sa passion pour les poètes. Tel Rimbaud, représenté cheveux ébouriffés et veste jetée sur l’épaule. Une image éphémère, certes, mais éternelle.