Florence Doléac
A la recherche du temps perdu
A la croisée de l’art et du design, Florence Doléac porte un regard décalé sur notre quotidien. La plasticienne toulousaine, désormais installée en Bretagne, détourne la fonction des objets, armée d’une bonne dose d’humour. A Dunkerque, le Frac Grand Large – Hauts-de- France lui consacre une première rétrospective, Minute papillon, où l’a priori banal devient une performance.
D’aussi loin qu’elle se souvienne, Florence Doléac a toujours dessiné et « fabriqué tout un tas de trucs ». Elle s’est d’abord tournée vers le design industriel, au sein du groupe Radi Designers, avant de tout plaquer en 2013. « J’ai choisi une vie d’artiste, dit-elle. Depuis, mon travail consiste en une critique douce du fonctionnalisme. Au fil du temps, l’humanité s’est entourée d’outils… mais en est devenue esclave. Alors, j’ai choisi d’en rire ». Une approche ludique s’incarnant par exemple dans ses poignées de portes, qu’elle imagine molles, en forme de crottes ou semblant couvertes de peinture fraîche. « Passer d’un espace à un autre est toujours un peu stressant, on ne sait jamais ce qu’il y a derrière la porte… peut-être un monstre ! J’aime capter l’attention dans ces instants peu propices à la blague ». Pour autant, il ne s’agit pas de concevoir des choses inutiles. C’est même tout le contraire, à l’image de ce sèchecheveux mural. Baptisé Les alizés, ce drôle d’appareil prend la forme d’un perron d’hôtel méditerranéen, nous conviant à mettre (perdre ?) la tête dans un nuage de vapeur. « Si l’électroménager était plus utopiste, on aurait des petits morceaux de vacances chez soi tous les jours ! »
Eloge de la lenteur
Première rétrospective consacrée à cette artiste inclassable, Minute papillon est conçue comme « une sorte de grand appartement peuplé d’objets étranges ». Le parcours est scindé en espaces domestiques : la chambre, le salon, le bureau… Comme son titre l’indique, c’est une invitation à la lenteur dans un monde hystérique. D’emblée, le visiteur peut s’abandonner sur Garbage saloon, un tas de poubelles des plus confortables. Il est même invité à se déchausser, pour emprunter un chemin plantaire offrant de surprenantes sensations. Plus loin, un fauteuil circulaire à six places (Adada), propose une assise à califourchon, tandis que des polochons sont accrochés au mur, prêts pour la bataille (En garde). « Oui, j’aime réveiller l’enfant qui dort en nous, ce petit état régressif permet de nous sentir beaucoup mieux ». Il s’agit de lâcher prise donc, mais aussi de s’évader.
La collecte des rêves
Au centre de l’exposition on trouve La chambre des rêves. Conçue spécialement pour Dunkerque, l’oeuvre s’inspire du lit du personnage d’enfant dans Max et les Maximonstres, de Maurice Sendak. Autour du meuble flotte un voile sur lequel sont imprimées les créations de l’artiste, mêlées à des images qui l’ont inspirée. « C’est une mise en scène du rêve, ce moment où l’on s’échappe de soi-même, une matière précieuse qu’on laisse hélas se perdre ». Florence Doléac développe ainsi une plateforme web un peu spéciale, intitulée Maxidreams. « Les gens y trouveront le plan de construction de ce lit à fabriquer chez soi. C’est une incitation à rêver, à partager ses songes en ligne. Je vais en tirer une banque de données, créant une colonie internationale de rêveurs ! »
Site internet : http://www.fracnpdc.fr/
Ouvert du mercredi au samedi: 12h - 18h
Dimanche : 12h-17h
Design Radical
Apparu dans les années 1960 en Italie, le Design Radical est « une remise en question de l’alliance entre la forme et la fonction. Il s’agit de laisser place à l’imaginaire et à la fantaisie », explique Keren Detton, la directrice du Frac Grand Large – Hauts-de-France. Ici, les créateurs jouent avec les formes et les matières. Parmi les six oeuvres présentées lors de ce focus, citons cette table basse signée Piero Gilardi aux allures de bloc de marbre… mais en réalité parfaitement molle – car fabriquée en mousse.