Paris est une fête
Le réveil de l’Histoire
Sylvain GeorgeCinéaste-chiffonnier, Sylvain George ramasse objets et discours pour essayer d’en extraire la logique de notre monde. Cinéaste-poète, il compose avec Paris est une fête un documentaire expérimental révolté et surprenant.
Paris est une fête ? Il fallait, au lendemain des attaques contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher, un certain courage pour l’affirmer. Mais le titre du roman d’Hemingway a cristallisé le désir de surmonter ensemble cette épreuve. En le reprenant, Sylvain George fait cependant entendre toute son ambivalence. Oui, il y a bien eu, sur la Place de la République devenue un temps monument aux morts, une fête. Celle d’une démocratie qui aurait enfin retrouvé la rue comme espace de dialogue et de décision privilégié. Comme dans Vers Madrid (2012), le cinéaste filme les foules assemblées, la parole qui circule, un espace-temps qui s’invente collectivement. Mais Paris est une fête est, comme son sous-titre l’indique, « un film en 18 vagues ». Pas de flux sans reflux. Les élans se brisent contre la répression de l’état. Cela vaut aussi bien pour Nuit debout que pour les exilés tentant de trouver un bout de trottoir où dormir. Car, c’est la force du documentaire, George ne reste pas en place. Il se glisse dans les interstices de la ville jusqu’à ses bordures les plus violentes. Et mesure l’écart qu’il y a entre Paris et la banlieue, les hyper-lieux et les non-lieux, le peuple dans la rue et les gens à la rue. Aucun angélisme donc, mais des points de rapprochement. Une constellation secrète qui illumine notre regard.
Documentaire de Sylvain George. Sortie le 12.04