Tim Yip
L’empire des sens
La Maison de la culture d’Amiens accueille à l’occasion de son 50e anniversaire l’œuvre protéiforme de Tim Yip. Figure de l’ombre du cinéma, il a notamment signé les costumes et décors de Tigre et Dragon, pour lequel il reçut un Oscar en 2001. Mais cet artiste chinois est aussi photographe, sculpteur, architecte… In Parallel donne à voir un travail tant esthétique que spirituel, traversé par la notion de « nouvel orientalisme» et la mystérieuse Lili.
Du haut du premier étage de la MCA, derrière ses lunettes de soleil, elle semble observer les passants qui déambulent sur la place Léon Gontier. « Elle », c’est Lili, la muse en fibre de verre qui accompagne Tim Yip à travers le monde. Pour cette exposition, l’artiste l’a fait poser dans les rues d’Amiens, ses cafés, sa célèbre cathédrale et un peu partout en baie de Somme. Une déambulation que l’on peut suivre à travers des photographies ou vidéos projetées le long du parcours. Mais qui est cet étrange mannequin à l’apparence si humaine, semblant glisser «en parallèle» de notre monde ? « Elle est comme un miroir, nous glisse Tim Yip. Lili est un objet vide dans lequel tout le monde peut se projeter, quelle que soit votre histoire et où que vous vous trouviez ». Une façon, aussi, de rendre l’art contemporain accessible, car interactif.
Incarnations – Pour cette exposition, Tim Yip a décliné Lili sous plusieurs formes. Au rez-de chaussée de la Maison de la culture, la voici immense et désarticulée, allongée sur un lit de galets typiques de la région. Elle incarne la triste histoire de ces travailleurs chinois qui ont péri dans la Somme durant la Grande Guerre. A l’étage, on la retrouve géante, telle une Alice au pays des merveilles vêtue comme une ado d’aujourd’hui, trait d’union entre songe et réalité. Plus loin, elle est recroquevillée en position foetale, sous forme d’une statue de marbre nous invitant dans son rêve… Tim Yip a trouvé en Lili « une signature, un symbole ». Elle lui permet d’exprimer une œuvre oscillant entre la vie et la mort, le réel et l’imaginaire, de circuler à travers le temps mais aussi les cultures, entre Orient et Occident. Un contraste entre ces esthétiques que l’on retrouve dans les superbes costumes exposés ici, comme cette robe qui mêle carreaux anglais et manches longues qui caractérisent l’opéra de Beijing. Un style qui, plus largement, introduit le « nouvel orientalisme », « une notion en mouvement, qui renvoie au vide mais incluant tout ce qui existe. Comme dans les estampes chinoises traditionnelles où les artistes laissent un espace que le spectateur peut remplir… ». A nous d’œuvrer, donc.
Site internet : http://www.maisondelaculture-amiens.com
Pour les Expositions : Ouverture du mardi au samedi de 13h à 19h, en continu les soirs de spectacles. Le dimanche de 14h à 19h.