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Chroniques ukrainiennes

Sergueï Loznitsa

Du mouvement populaire appelant en 2013-2014 à l’émancipation de l’Ukraine vis-à-vis de la tutelle russe jusqu’à la résistance héroïque contre l’armée de Vladimir Poutine, la continuité historique est évidente. Avec Maïdan et maintenant L’Invasion, Sergueï Loznitsa s’avère l’un des chroniqueurs les plus précieux de cette période complexe.

Loznitsa, cinéaste patriote ? Dans la conjoncture qui est celle de l’Ukraine (indépendante depuis 1991, attaquée par la Russie depuis plus d’une décennie), raconter la “naissance d’une nation” relève peut-être d’une nécessité vitale. Traversé par une colère froide et une tristesse infinie devant tant de vies gâchées, L’Invasion ne craint pas de verser dans l’allégorie. Couvert du drapeau ukrainien, un soldat et une jeune femme s’étreignent longuement au milieu d’une artère piétonne de Kyiv. Tandis qu’à l’horizon éclatent les bombes, une vieille dame empile patiemment les briques de sa maison détruite, figure exemplaire de la résistance populaire. Si juste soit la cause, le documentaire pourrait alors verser dans la propagande. Mais Loznitsa sait aussi prendre ses distances. Ainsi du ravitaillement, qui prend à l’occasion des allures de partie de campagne, avec ses vélos filant vers l’horizon et ses baigneurs au pied d’un pont détruit. La politique du cinéaste se loge dans de tels écarts entre les choses et les symboles, les corps et la cause qui les requiert. Il est permis de voir là les raisons même de la lutte – des ouvertures démocratiques.

Raphaël Nieuwjaer - Photo © Atoms & Void

Sortie le 08.10.2025

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