Ministère A.M.E.R
Retour aux affaires
Une institution ? Évidemment. Formé à Sarcelles à l’aube des années 1990, Ministère A.M.E.R, l’un des groupes emblématiques du rap français, s’offre un retour trente ans après un dernier méfait qui secoua durablement le paysage hip-hop hexagonal. Et dont les répliques se font encore sentir.
Cette tournée prend prétexte du trentième anniversaire du second (et ultime album) du collectif : 95 200, ainsi nommé en clin d’œil à leur ville (Sarcelles) et au soap qui cartonnait à l’époque (Beverly Hills 90210). Un petit brûlot paru en 1994 – l’année précédant l’âge d’or du genre, donc. Comme un signe que ces trois-là (Passi, flow posé, Stomy Bugsy, gouaille rigolarde et DJ Ghetch) étaient arrivés un poil trop tôt pour récolter les fruits de leur art. En effet, drôle de place que celle de Ministère A.M.E.R dans la longue et riche histoire du rap français. Moins souvent cité que les pionniers NTM ou IAM, il demeure un groupe fondamental pour un certain pan du hip-hop d’ici : le rap de rue.
Mis à l’amende
Aux côtés d’Expression Direkt ou Timide et sans complexe, et un peu avant Lunatic, le Ministère fut le porte-voix d’un flow dru et cru, héritier de Public Enemy et de NWA. Plus vite que les balles, c’est ni plus ni moins 100 Miles and Runnin’ de la bande à Dr. Dre. On ne reviendra pas sur Brigitte, pochade anti-flics qui leur valut une tentative d’interdiction par Charles Pasqua (note aux plus jeunes, le Darmanin de l’époque) pour mieux évoquer Un été à la cité : pas une ride dans cette chronique saisissant une banlieue aride, sèche et suintant l’ennui. Passi et Stomy Bugsy prirent ensuite des chemins plus lucratifs, chacun de leur côté. C’est moins intéressant, mais il restera toujours deux albums qui témoignent d’un moment charnière du rap français.