Home Cinéma Un peuple

Retour de bâton

Un peuple © Les films Velvet

Depuis J’veux du soleil de Gilles Perret et François Ruffin, sorti en avril 2019, les Gilets jaunes occupent régulièrement les écrans français. Tourné à Chartres et dans sa périphérie, Un peuple s’inscrit dans le quotidien, euphorique et chahuté, de ceux qui entendent redonner un sens à la démocratie.

En se concentrant sur quelques figures, Un peuple semble d’abord en contradiction avec un mouvement qui s’est largement défié des processus de représentation. Porte-parole ou coordinateurs, Agnès, Benoît, Nathalie et Allan n’occupent toutefois aucune position d’autorité, et ne se distinguent pas davantage par leur charisme. Plutôt que des icônes de la révolte, Emmanuel Gras suit des gens ordinaires, âgés pour la plupart d’une cinquantaine d’années, dont la vie se trouve bouleversée par quelque chose qui les dépasse de plus en plus…

Dignité retrouvée

La puissance du mouvement tel que le montre ce documentaire tient moins à ses élaborations conceptuelles (les débats sur le référendum d’initiative citoyenne) qu’à ses pratiques égalitaires et à l’affirmation d’une fierté populaire. C’est bien celle-ci qui sera mise à mal par les gaz lacrymogènes, les tirs de Flash-Ball et les coups. Une discussion laissera entendre le traumatisme qu’a pu engendrer la réponse de l’État, coinçant chacun entre la peur et la honte de cette peur. Car voilà aussi ce qu’est la politique : une affaire de corps qui se rassemblent, se dressent, s’exposent. En l’occurrence, des corps brisés par le travail, la rue ou la précarité ayant (re)trouvé un élan, une tenue, pour faire face et affirmer leur dignité. Si Un peuple témoigne, après l’enthousiasme des débuts, d’un épuisement profond, il suggère aussi que le feu a laissé des traces.

Raphaël Nieuwjaer / Photo : © Les films Velvet

Documentaire d’Emmanuel Gras. En salle

Articles similaires