Scieur Z
Lame de fond
Mais qui est Scieur Z ? Un bûcheron masqué ? Un savant fou aux formules tranchantes ? Plutôt un « explorateur sonore » œuvrant dans son laboratoire home-studio, sous influence dada. Ce joueur de scie est définitivement un cas à part dans le paysage musical français.
La Picardie, dans les années 1970. Renaud Lacoche vit à Tergnier, l’une des plus importantes gares de triage de l’Hexagone. Ce fils de cheminot monte ses premiers groupes et aiguise sa plume lunaire et rageuse au sein de Président Z, combo postpunk rendu atypique par l’introduction de la scie musicale, pour laquelle il s’est pris de passion. « Ce son envoûtant et mystérieux m’a attiré dès le début des années 1980, et peut-être même inconsciemment, avec le chant des rails de mon enfance, que je nomme “la voix des voies” », explique- t-il. L’idée de l’incorporer dans le groupe est venue spontanément car j’admirais des formations utilisant des instruments décalés : violon pour le Velvet Underground, flûte traversière pour Genesis… ». Finalement, Président Z périclite, mais Scieur Z surgit aussitôt. Une suite qui s’écrit désormais en solo. La cinéphilie expressionniste s’invite depuis lors sur scène (cut-up vidéo et projections live) où son jeu évoque les ondes Martenot ou le thérémine.
La scie a du chien
Plasticien de formation et enseignant, Renaud Lacoche est à la fois compositeur et chercheur. Il s’adonne à la musique concrète (via la thématique ferroviaire, véritable leitmotiv-locomotive), des collaborations bruitistes ou à la fabrication d’instruments, telle la guitare-cello, hybride entre guitare électrique et viole de gambe. « J’aime créer des textures et des ambiances, mais ne perds pas de vue la mélodie et les harmonies ». Son talent de lamiste l’amène à participer à l’album Un Dimanche à Bamako d’Amadou et Mariam, sur lequel il enregistre deux titres : La Fête au village et Camions sauvages. Après quelques lointains voyages, il achève enfin un concept-album au titre jubilatoire, Virtuellement vautre, assez raccord avec l’époque. Transhumanisme, cybernétique, néolibéralisme, environnement… tout y passe ! Un pamphlet acide, porté par une voix singulière, entre jeux d’esprit et sprint “cru-scie-verbiste”. Il s’en amuse : « la scie montre enfin ses dents ! ». Mais ne mord pas pour autant.
A visiter / www.scieurz.fr
A écouter / Virtuellement vautre (Musea Records / Gazul Records)
A lire / Train de vie (éditions Les Soleils Bleus)