Doc Gynéco
Deuxième consultation
Le 15 avril 1996 sortait Première consultation, fruit d’un certain Doc Gynéco. 20 ans plus tard, le disque est un classique du rap hexagonal. Mais son auteur en a vu des vertes et des pas mûres. Entre une implication politique hasardeuse et des albums de qualité discutable, Bruno Beausir a disparu de la scène en 2008. Le revoici avec son premier album (!) sous le bras et une tournée-anniversaire en forme de résurrection. Mais au fond, quoi de (vraiment) neuf Doc ?
Où étiez-vous passé ?
Je suis resté chez moi pendant plusieurs mois. Il fallait que je me reconstruise, que je pense à ma famille pour mieux reprendre la route. Et voir qui étaient mes amis et mes vraies copines… J’ai tout remis à plat. J’ai aussi travaillé en attendant, pour me reconnecter à la vraie vie. Repartir à zéro, comme Samy Naceri (rires).
Comment avez-vous fait ?
Un proche m’a dit : « puisque tu ne fais rien l’artiste, tu vas nous aider au bureau ». Il s’agissait en fait d’un bureau de tabac, imaginez la désillusion (rires). à l’époque j’étais tiraillé entre la vie réelle et celle de l’artiste, veillant à ne plus commettre les erreurs du passé.
Justement, qu’avez-vous retenu de votre expérience en politique ?
C’est un milieu très particulier et qui me fascinait. Surtout l’évolution du concept de communication politique. Un domaine semblable au monde du spectacle, avec ses propres show-men. J’en retiens les codes empruntés au milieu artistique, les politiques sont devenus les nouvelles rock stars. Il n’y a qu’à s’attarder sur les règles vestimentaires ou communicationnelles pour s’en rendre compte. Ils nous ont beaucoup copiés pour en arriver là, entourés par leurs staffs et leurs managers !
Parlons musique, comment l’idée de ce retour sur scène est-elle née ?
Elle vient du public. Que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans la rue, on me demandait sans cesse quand je comptais revenir sur scène ou ressortir un album.
Mais pourquoi revenir avec le tout premier ?
Il est comme une franchise, une marque. Si ça ne tenait qu’à moi je serais revenu avec un nouvel album ! Mais la demande est si importante pour ce disque… Alors ainsi soit-il !
Dans quelles conditions est-il né ?
J’approchais la vingtaine et je vivais encore chez mes parents, plus précisément dans ma chambre, que l’on peut voir sur la pochette, d’ailleurs. J’ai procédé par étapes, sinon toutes mes idées se seraient emmêlées. J’aurais pu accoucher de tellement plus de chansons, cinquante sûrement ! Mais j’ai pris mon temps, pesé chaque mot, chaque phrase, en y plaçant même intentionnellement quelques fautes ou incorrections.
Comment Première consultation fut-il perçu à sa sortie ?
Les thèmes des chansons étaient inhabituels, le rap devait répondre à certaines règles, une manière de parler, de s’habiller… J’étais vraiment différent. Mais heureusement c’est le public qui décide.
Vous parliez aussi de sexe, de façon décontractée…
Oui. C’était tabou et pas forcément évident ! D’autres l’avaient déjà fait comme Gainsbourg. Quand on abordait le sujet il fallait savoir comment le tourner, l’enrober, s’amuser un peu ! Aujourd’hui j’ai l’impression que le sexe a tendance à se vulgariser.
Avez-vous conscience de l’impact de cet album sur le rap français ?
Oui, avec le temps. J’entends même des jeunes rappeurs qui s’en inspirent ! Ça reste assez gênant d’en parler, car je suis pudique. J’ai pris tellement de temps à le réaliser, à le soigner. C’est pourquoi il est probablement devenu intemporel.
Comment qualifieriez-vous votre rap ?
La capacité de traiter de sujets sérieux sans se prendre au sérieux, justement. à l’inverse de certains MCs…
Proposez-vous de nouveaux titres durant cette tournée ?
Non, car je ne souhaite pas gâcher la fête avec de la publicité. Pourtant je prépare bien un nouvel album. L’aventure continue ! Un des morceaux s’intitulera Peur de manquer.
Et que proposez-vous sur scène ?
Je débarque avec plein de danseurs, un show à l’américaine…Non, je rigole, nous n’en avons pas vraiment les moyens (rires). Tout reposera sur le son, c’est le plus important. Quatre musiciens m’accompagnent : basse, batterie, guitare, voix. Je vais moi-même jouer d’un instrument.
Lequel ?
Du pipeau (rires) !
Première consultation (Parlophone / Warner Music) :
Edition Deluxe (2 cD), sortie le 15.04
Coffret tiré à 1 000 exemplaires (3 CD + 2 vinyles), sortie 13.05