Théodore Géricault
A Hauteur d'Homme
De la courte vie de Géricault (1791-1824), on garde en mémoire le colossal Radeau de la Méduse, évidemment. Achevée peu avant la mort du Rouennais, l’œuvre fit de lui, dans l’imaginaire collectif, le peintre de la douleur et de la mort. Qu’en est-il réellement ?
Qu’on se le dise : Théodore Géricault n’est pas réductible à la Méduse, dont nous est présentée la réplique historique venue du musée d’Amiens. C’est aussi la série des Monomanes, dont la célèbre Hyène de la Salpêtrière, vieille femme au regard fixe et au rictus crispé. Cette attention portée au personnage plus qu’au contexte révèle un grand peintre humaniste et non pas un simple romantique. Les tableaux, estampes et dessins exposés ici montrent à quel point Géricault sonde l’âme humaine, avec empathie. Ses portraits, ses grandes fresques, témoignent de la vie de tous les jours, celle des familles les plus modestes. Et lorsqu’il s’intéresse aux tragédies de son temps, notamment les désastres de la guerre, il ne montre pas les héros mais les soldats blessés. à mesure qu’on chemine dans les couloirs du MSK, on découvre les œuvres d’autres maîtres tels Goya, Delacroix, ou Jean-Baptiste Carpaux répondant à Géricault dans un contexte plus large. Mieux encore, deux artistes contemporains Alfredo et Isabel Aquilizan, spécialistes du thème de l’émigration soulignent la dimension politique de l’auteur du Radeau de la Méduse. En pénétrant dans leur salle jonchée de bidons, de valises, de voiles, on perçoit le vibrant écho entre le chef-d’œuvre accroché au Louvre et les récentes tragédies de Lampedusa.