Beth Gibbons
Retour en grâce
Si elle est assez parcimonieuse, la discographie de Beth Gibbons tutoie les sommets tout en brouillant les pistes. D’abord indissociable de Portishead (et donc du trip-hop, dont les contours sont restés aussi flous que la brume d’où il a émergé), la chanteuse et compositrice s’est sporadiquement aventurée en-dehors de la formation qui la lie à Geoff Barrow. On se souvient par exemple d’un Out of Season fomenté en 2002 avec l’ex-Talk Talk Rustin Man (le grandiose Funny Time of Year) ou du plus confidentiel Symphony n°3, interprétation de Henryk Górecki avec orchestre. L’Anglaise a toujours su tirer parti de son timbre en équilibre entre retenue et expressionnisme. La retrouver sur scène est un évènement à la hauteur des prodigieuses nouvelles chansons de Lives Outgrown.
Beth Gibbons
Lives Outgrown
(Domino)
Malgré quelques embardées hors-Portishead, Lives Outgrown est le premier disque de Beth Gibbons publié exclusivement sous son nom. Qu’on ne s’attende pourtant pas à l’ascèse, au dénuement : l’album compte parmi les plus luxuriants que l’artiste ait pu enregistrer. Cette collection de dix chansons amples, parfois tortueuses, toujours envoûtantes, oscille entre majesté (Lost Changes et ses arrangements cinématographiques) et sortilèges (l’hypnose intranquille de For Sale). Un peu comme sur Third (3e opus de son illustre groupe), mais qui aurait troqué le kraut et l’electronica contre un classicisme transfiguré. Un jalon essentiel.