Tristan et Isolde
L'amour en toutes lettres
Pour ses grands débuts lyriques, Tiago Rodrigues s’attaque au Tristan et Isolde de Wagner, son opéra préféré. Mais c’est à travers l’écriture qu’il s’empare de cette oeuvre, remplaçant le dispositif de surtitrage du livret par son propre texte. Le dramaturge portugais offre ainsi sa propre vision d’un sommet du romantisme.
Nous découvrons une immense salle d’archives, disposée sur trois niveaux et formant un hémicycle. En silence, deux danseurs aux mains gantées extraient des rayonnages exactement 947 pancartes. On y lit, pêlemêle : “Quel est son secret ? “… “Pourquoi n’est-il pas venu ?”… “La femme triste est une sorcière ?”… À travers cette mise en scène audacieuse, Tiago Rodrigues a donc remplacé le surtitrage des paroles en allemand par un texte de sa composition, présenté en français sur des panneaux rectangulaires. Il s’agit de « mettre au jour le monde invisible que nous dévoile le chant », selon le Portugais. Et, accessoirement, « d’assister à un opéra sans lever la tête pour lire les surtitres ». Les phrases glissent dans les interstices de la musique, et font jaillir les jeux de l’inconscient amoureux, comme un palimpseste superposé sur l’oeuvre originale. L’orchestre, cet autre personnage, évoque le désespoir, la rage, le désir ou l’ivresse mais le texte n’altère pas la partition. Il en renforce plutôt l’expressivité, au plus près de la psychologie des amants maudits. En réunissant récit, musique et chant, Tiago Rodrigues offre ainsi une lecture contemporaine à cet opéra-monument.
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