iTAK
Les possibilités d'une île
C’est une tradition dans la cité du Clair de Lune, qui a toujours agrémenté le printemps d’un grand festival. Il y a eu les Inattendus, puis les Folies, Via, Supervia… Voici maintenant iTAK. À Maubeuge, mais aussi Bruxelles, Mons ou Valenciennes, en salle ou à l’extérieur, cette programmation célèbre le spectacle (bien) vivant, entre danse, cirque, théâtre, musique… et parfois tout cela en même temps.
Le choix du nom n’est pas anodin. « J’avais envie de quelque chose qui sonne comme une onomatopée », débute Géraud Didier, le directeur du Manège de Maubeuge, à la baguette de ce nouveau rendez-vous. L’intitulé renvoie aussi à Ithaque, cette île qu’Ulysse quitte avant de la retrouver après un long périple initiatique. « Comme les meilleurs spectacles finalement, synonymes de voyages émotionnels et intellectuels ». Soit 35 propositions soulevant de sérieuses questions (le genre, la politique, le climat) « mais dans un esprit plutôt joyeux ». À l’instar d’Ubu Cabaret, relecture déjantée de la farce sur le pouvoir signée Alfred Jarry, ici interprétée par des drag queens, entre coups de revolver et courses de bicyclettes !
Du rap qui dérape
Au rayon décalage, citons aussi Métagore Majeure, où deux duchesses nous donnent rendez-vous dans une friche industrielle, en pleine nuit, pour déclarer leur flamme à Booba. Eclairées par les phares d’une voiture, habillées en costume d’époque, ces dames que B2O prend pour des “biatchs” démontrent elles aussi un sens certain de la punchline. Enfin, Michel Moglia donne un tout autre sens à la notion de feu d’artifice. Ses “chants thermiques” racontent une humanité soumise aux aléas climatiques… avec des orgues à feu, soit d’immenses sculptures sonores crachant des flammes de plusieurs mètres. En somme, le show et l’effroi.
LA PREUVE PAR 4
Poquelin II
(Tg STAN)
Plus qu’un spectacle, une grande fête théâtrale… à la sauce flamande ! C’est-à-dire baroque, loufoque et jubilatoire. Le collectif tg STAN (soit “Stop Thinking About Names”) célèbre comme il se doit les 400 ans de la naissance de Molière. Après une première relecture de l’oeuvre de Jean-Baptiste Poquelin au début du millénaire, les Anversois récidivent en se réappropriant cette fois L’Avare et Le Bourgeois gentilhomme. Sur une grande estrade en bois, pile dans la tradition originelle du théâtre de tréteaux, sept comédiens incarnent durant près de trois heures tous les personnages des deux pièces, avec un sens inégalé du ridicule et de l’autodérision. Qu’il s’agisse de railler l’avidité du pouvoir, le mensonge, la cupidité ou la volonté de puissance, les Belges rendent grâce à un répertoire immortel avec force mimiques et regards évocateurs, tandis que les répliques fusent comme des balles de fusil jusque dans les coulisses – où même le souffleur se prend une soufflante. Un jeu sans artifice, mais terriblement efficace. La comédie à l’état pur.
>> Maubeuge, 06 & 07.05, La Luna, 20h
Aucune idée
(Christoph Marthaler)
Dans cette succession de saynètes poético-absurdes, le comédien Graham F. Valentine et le violoncelliste Martin Zeller s’interrogent sur un étrange phénomène : la lacune. D’ou vient-elle ? Où se niche-t-elle ? “Aucune idée” répond le duo, dans un spectacle empruntant à Buster Keaton comme à Jacques Tati.
>> Maubeuge, 09 & 10.05, Le Manège, 20h
This is Not a Love Song
(Lola Giouse / La Division de la joie)
Derrière ce titre rappelant un hymne punk de Public Image Ltd se cache une pièce fiévreuse. Simon Hildebrand et Géraldine Dupla y racontent l’incandescence de leur nuit d’amour, la décrivant dans le détail en se posant mille questions sur l’acte charnel. Où il sera question de désir, de complicité et de légèreté.
>> Maubeuge, 13.05, Jardin des Cantuaines, 22h30
L’homme qui tua Mouammar Kadhafi
(Superamas)
Familier des pièces mêlant fiction et réalité, le collectif Superamas pousse son art toujours plus loin. Dans ce spectacle documentaire, et pour la première fois en France, un ancien officier de la DGSE révèle à visage découvert ce qu’il sait des véritables causes de la mort de Mouammar Kadhafi, en octobre 2011. Interrogé sur scène par le journaliste Alexis Poulin, ce témoin rare fait toute la lumière sur l’assassinat du dictateur libyen, et répond même aux questions du public. Une plongée exceptionnelle dans les eaux troubles de la géopolitique.
>> Feignies, 11.05, Espace Gérard Philipe, 20h
Sélection / 05.05 : Clinic Orgasm Society – George // 06 & 07.05 : tg STAN – Poquelin II // 07.05 : Jean Lambert-wild & Lorenzo Malaguerra – Ubu Cabaret, Claudio Stellato – Performance, Zoé Nève – Tourisme // 09 & 10.05 : Christoph Marthaler – Aucune idée // 11.05 : Superamas – L’Homme qui tua Mouammar Kadhafi // 12.05 : Cie Fatum – Le Cogitoscope // 13.05 : La Division de la joie – This Is Not a Love Song // 13 & 14.05 : Augustin Rebetez & Niklas Blomberg – Voodoo Sandwich // 14.05 : Hugues Duchêne & Royal Velours – Je m’en vais mais l’état demeure // 14 > 25.05 : Christian Lutz – Insert Coins (exposition) // 18.05 : Amandine Pudlo & Valéry Warnotte – Petit Bœuf / Passion, Cie Canicule – Métagore Majeure // 19.05 : Alain Damasio & Yan Péchin – Entrer dans la couleur // 19 & 20.05 : Joël Pommerat – Contes et légendes // 20.05 : Diederik Peeters – Apparitions // 21.05 : Cie Dérézo – Ce que voient les oiseaux, Esther Ferrer – Je vais vous raconter ma vie, Marie-Caroline Hominal – Le Cirque Astéroïde, Michel Moglia – Aléas climatiques, Groupe F – Insomnie // 24 & 25.05 : Gurshad Shaheman – Les Forteresses