Corps étranger
Remue-ménage
Une clandestine quasi muette, une veuve fortunée et un beau brun ténébreux à l’évidente vénalité… À travers ce curieux ménage à trois, Raja Amari privilégie les rapports humains à l’engagement politique. Et elle le fait plutôt bien.
Samia, migrante tunisienne, échoue de ce côté-ci de la Méditerranée avant de s’installer à Lyon. Son objectif est double : obtenir des papiers français et, surtout, échapper à son frère radicalisé qu’elle a dénoncé des années plus tôt. Désorientée, elle trouve d’abord refuge dans les bras d’Imed, ami d’enfance au charme indéniable. Puis elle atterrit chez Leila en tant que femme de ménage, veuve dont la tristesse n’a d’égale que la fortune. Dès lors, s’installe entre ces trois-là un pervers jeu de séduction mâtiné de tendresse familiale… En dépit des apparences, la cinéaste Raja Amari (Satin rouge) signe un long-métrage refusant tout discours politique sur l’immigration ou la radicalisation. Il est ici question d’identité, de tolérance, de promiscuité. Quasi tournée en huis clos, l’action se déroule essentiellement dans les appartements de Leila. Le spectateur s’interroge alors : qui est cette bourgeoise esseulée ? Et pourquoi s’entiche-t-elle de ces deux âmes perdues ? Nul ne le saura jamais, tant la réalisatrice entretient le flou autour des trois amants. Principal regret : le thriller érotique l’emporte trop vite sur les motivations du frangin revanchard. L’intention du film était ambitieuse mais sa résolution s’avère bâclée.
De Raja Amari, avec Hiam Abbass, Sara Hanachi, Salim Kechiouche… Sortie le 21.02