Halka
Le grand saut
Des pyramides humaines, des roues qui ne semblent jamais s’arrêter, des sauts dans le vide dignes d’un écureuil et puis des chants, des danses, des rires… Avec Halka, le Groupe Acrobatique de Tanger se joue de la pesanteur avec poésie, et nous raconte l’histoire d’un art ancestral.
Au Maroc subsiste une tradition de l’acrobatie aussi ancienne que méconnue. Celle-ci est née au xve siècle et son « Saint Patron » est le sage soufi Sidi Ahmed Ou Moussa. à cette époque, la voltige a une vocation guerrière. « Les combattants de cette confrérie dressaient des pyramides humaines pour espionner l’ennemi au-delà des murailles ou surveiller les voleurs au lointain » souligne Sanae El Kamouni, directrice du Groupe Acrobatique de Tanger. L’autre caractéristique de cet art réside dans l’exécution de la roue arabe, figure faisant tourner le corps de l’interprète sur lui-même à l’infini. « Plus tard, ces guerriers se sont mués en artistes, plusieurs familles marocaines ont alors perpétué cette tradition, de génération en génération ». C’est le cas des Hammiche, découverts il y a 11 ans par Sanae et le chorégraphe toulousain Aurélien Bory.La rencontre eut lieu sur la plage de Tanger, « où se retrouvent les acrobates du pays, les agents du cirque les recrutant là-bas ». Le projet de Sanae et d’Aurélien est inédit. « Certes, il s’agissait pour nous de valoriser ce patrimoine en voie de disparition mais en lui donnant un nouveau souffle, grâce à la création contemporaine ». Ainsi naquit le Groupe Acrobatique de Tanger.
Clowns tristes
Cette troupe de 14 acrobates raconte sa propre histoire dans Halka, mot arabe signifiant « cercle », mouvement central de la pièce. Sur un plateau nu, ils narrent leurs débuts sur la plage où ils apprirent l’exécution de la roue attachés à leur maître par une ceinture. Ils évoquent la destruction de leur lieu de travail, cette fameuse digue de Tanger désormais rasée pour laisser place à une Marina, lors d’une scène poétique où le sable s’écoule du ciel… Ils nous parlent aussi de leurs amis qui ont tenté de traverser la Méditerranée, espérant un ailleurs meilleur mais n’en revenant jamais… Drôle, triste et diablement spectaculaire, Halka dépeint la vie de ces artistes singuliers avec ses bas, ses combats et ses très, très hauts.