Dans ma tête un rond-point
À la vie à la mort
Qu’un premier long-métrage documentaire consacré aux abattoirs d’Alger sorte en salles n’avait rien d’une évidence. Mais depuis son passage au FID Marseille, Dans ma tête un rond-point n’a cessé d’être primé. Normal : Hassen Ferhani a réalisé un grand film.
Peut-on parler d’amour dans un abattoir ? Et rêver de révolution ? Oui, évidemment. Pourtant, cela ne manque pas d’étonner. C’est que depuis Le Sang des bêtes, réalisé en 1949 par Georges Franju, le cinéma aura surtout visité ce type d’endroit pour en révéler l’horreur. Hassen Ferhani, né en 1986 à Alger, a pris le contre-pied de cette tradition. Dans ma tête un rond-point ne tire aucun spectacle de l’agonie des bêtes. Pourtant celles-ci sont bien là, massives, dans un coin du cadre ou sur son bord. Mais autre chose intéresse le cinéaste : les êtres qui peuplent cet espace et les manières qu’ils ont de l’habiter. Le lieu de mort se révèle aussi un lieu de vie. De l’abattoir, on ne sortira que le temps d’un plan aérien. Coincé entre deux voies rapides, il est situé au coeur de la capitale algérienne. Certains vieux y travaillent depuis 1945. Les plus jeunes espèrent s’en échapper. C’est une prison et une maison, où l’on vit avec les chats et les oiseaux. En immersion, certes, Ferhani ne s’impose pas. Il écoute, veille, puis finit par répondre aux questions qu’on lui pose. Des liens se sont tissés, une confiance, une amitié. Peut-on attendre chose plus bouleversante d’un documentaire ? Celui-ci peint, dans la lumière rose de la nuit algéroise, des portraits inoubliables.
D’Hassen Ferhani, en salle