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Que la meilleure gagne

Rusudan Chkonia

Devant les caméras de la télé géorgienne, dix femmes concourent pour le titre de “meilleure mère de l’année”. On croise la timide étouffée par sa propre génitrice, la plantureuse entretenue et désirant réussir par elle-même. La quadra infidèle redoutant la vieillesse… A la clef, 25 000 dollars, un appartement, et l’espoir pour toutes d’accéder à une nouvelle vie.

Entre les danses apprises à la hâte sous l’œil d’un chorégraphe autoritaire et les épreuves où s’affrontent les candidates avant la grande finale, le premier long métrage de la géorgienne Rusudan Chkonia tient toutes ses promesses de tragi-comédie grinçante et irrévérencieuse. Ainsi, le diplôme de meilleure cuisinière est décerné à la mère qui aura su régaler tout un camp de réfugiés, tandis que le jury incite une autre à dévoiler sa tragédie familiale pour s’attirer les faveurs du public. En montrant le spectacle de la misère humaine, la réalisatrice pointe ouvertement les contradictions d’un pays en pleine mutation : le concours célèbre des valeurs patriarcales tout en affichant sans pudeur des corps fatigués dans des bikinis dorés.

Sur le fil
Qualifié de féministe à sa sortie en Géorgie, ce film tire sa force de l’incroyable palette de personnalités mises en scène. Les femmes sont fortes, se déchirent pour un homme, se battent pour leur famille et finissent par lutter ensemble contre les humiliations. À l’image de la chanson Baby Keep Smiling de Lou Bega, qui rythme toute l’œuvre avec ironie, le film de Chkonia flirte en permanence entre drame et légèreté, quitte à verser parfois dans l’obscène. Une dualité incarnée dans la figure de la névrosée Gvantsa : lorsqu’elle tente de prendre sa revanche artistique, la violoniste offre certains des moments les plus bouleversants.

Marine Durand

Avec Ia Sukhitashvili, Gia Roinishvili, Olga Babluani…

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