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Modern Love

Joyland_01_©Condor Distribution

Un coup d’essai comme un coup de maître. Pour son premier film, le Pakistanais Saim Sadiq raconte une histoire d’amour hors norme : celle entre une artiste transsexuelle et un jeune époux étouffant dans une société patriarcale. Une oeuvre magistrale, effrontée… et frontale.

Haider vit avec son père, son épouse Mumtaz, mais aussi son frère aîné, sa belle-soeur et leurs enfants. Sans emploi, il finit par décrocher un rôle de danseur dans une troupe menée par Biba, artiste transgenre dont il s’éprend sur-le-champ. Iconique, irréelle, celle-ci fabrique son propre folklore. Démesurée, son image hante son prétendant et l’espace public, jusque dans la demeure paternelle, et rappelle l’importance d’habiter son propre corps. Car dans ce huis-clos familial, le patriarcat régit le quotidien. Face aux injonctions, Haider et Mumtaz s’adaptent, entre autocensure sous le toit familial et danse libératrice sur les rooftops de la ville. Malgré moult fenêtres, miroirs, patios, chambranles, portes entrebâillées pour (re)cadrer et enfermer les protagonistes (quand ils ne sont pas tout simplement filmés de dos), rien à faire, les corps ne fileront pas droit ! Saim Sadiq rend ici hommage à la communauté trans de Lahore, ville dont il est originaire. Ce premier long-métrage remarqué (prix du jury “Un certain regard” à Cannes, entre autres) illustre bien la schizophrénie propre au Pakistan : il a été sélectionné pour les Oscars, puis interdit de diffusion dans le pays… Pourtant, au-delà du simple plaidoyer transgenre, ce film défend toutes les libertés dans un mouvement choral et universel.

Selina Aït Karroum / photo © Condor Distribution

De Saim Sadiq, avec Alina Khan, Ali Junejo, Rasti Farooq, Sarwat Gilani… Sortie le 28.12


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