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L'amour vache

© Kate Kirkwood / Ad Vitam

Vêler, passer à la traite. Parfois, s’ébrouer dans un pré. En s’intéressant à la vie ordinaire d’une vache laitière, Andrea Arnold fait mieux que dénoncer les conditions d’élevage. Par le prisme de la grande tradition britannique du cinéma social, elle témoigne du prolétariat… des animaux.

Le cinéma social, Ken Loach en tête, vise à rendre perceptible les structures de domination à travers le parcours d’un individu ou d’un groupe. Pour cela, un style s’est presque imposé : caméra portée, extrême proximité avec le sujet (parfois ici jusqu’à la collision), montage abrupt, attention au corps et aux affects. L’empathie avec le personnage est alors proportionnelle aux obstacles contre lesquels il bute, et dont la dimension systémique se révèle précisément au fil de son parcours obstiné. L’intelligence de Cow tient d’abord à sa manière d’épouser pleinement cette esthétique. D’un même mouvement apparaissent ainsi la singularité de l’animal et son aliénation. Car c’est bien cela que saisit la réalisatrice de Fish Tank (2009) : une existence inscrite dans un appareil de production qui en conditionne le milieu, les déplacements, les relations et même la durée. Cette vie, c’est celle de Luma, une vache laitière élevée dans une grande ferme. Un destin qui, en somme, ne peut se comprendre seulement si on considère les animaux comme des membres (particulièrement mal traités) de nos sociétés spécistes et capitalistes. Cow participe ainsi avec force de ce grand mouvement contemporain de reconsidération des liens entre la faune et les humains.

Raphaël Nieuwjaer / photo © Kate Kirkwood / Ad Vitam

Documentaire d’Andrea Arnold. En salle


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