Home Exposition Vivian Maier

De l'ombre à la lumière

Self-Portrait, Chicago, IL, 1956 © Estate of Vivian Maier, Courtesy of Maloof Collection and
Howard Greenberg Gallery, NY

De Vivian Maier (1926 – 2009), on sait peu de choses. Française par sa mère, Américaine par son père, cette artiste prolifique travailla toute sa vie comme nounou à Chicago, tout en documentant son quotidien, appareil photo en main. Bozar expose le pan intime d’une oeuvre devenue culte, depuis sa découverte à la fin des années 2000.

120 000 négatifs, pour beaucoup jamais développés. Voilà l’ampleur des archives de Vivian Maier, achetées par hasard par le collectionneur John Maloof lors d’une vente aux enchères, puis soigneusement conservées et classées. C’est aussi dans ce fonds foisonnant que s’est plongée la commissaire Anne Morin pour l’exposition qui s’ouvre début juin au Palais des beaux-arts de Bruxelles. Avec un angle bien précis, l’autoportrait, « car aucun photographe ne s’est penché avec autant de constance et de ténacité sur la question de l’autoreprésentation », note la directrice du studio diChroma photography. À l’heure du selfie roi, cette thématique explique l’extraordinaire engouement suscité par l’artiste, depuis que ses images sont montrées autour du monde.

Une invisible de l’Amérique

Autoportrait frontal, silhouette en contre-jour, jeux de miroir… Les 93 clichés sélectionnés dessinent le parcours d’une fille d’immigrés au service des autres, qui saisit son Rolleiflex, et plus tard son Leica, comme un acte de résistance. « De l’ombre au portrait physiologique, il y a tout un vocabulaire que Vivian Maier déploie déjà dans l’enfance, lorsqu’elle s’amuse avec le Kodak Brownie de sa mère, dans la vallée du Champsaur », décrypte Anne Morin, qui a découpé l’espace en trois volets : “Ombre, Reflet, Miroir”. À Bruxelles, six photos sont présentées pour la première fois au public. De quoi trouver l’inspiration pour “pimper” nos prochains selfies.


Oeuvres commentées par Anne Morin, commissaire de l’exposition 

Self-portrait, Chicago, IL, 1956

© Estate of Vivian Maier, Courtesy of Maloof Collection and Howard Greenberg Gallery, NY

© Estate of Vivian Maier, Courtesy of Maloof
Collection and Howard Greenberg Gallery, NY

« La typologie des autoportraits de Vivian Maier est très variée, et ici, avec cette projection de l’ombre, nous ne voyons plus tout à fait un portrait mais une empreinte. Il y a un morcellement, un éclatement. L’artiste sème des indices de sa présence. Cette photo rappelle le mythe de Dibutade, raconté par l’auteur romain Pline l’Ancien. Un potier de Corinthe découvrit l’art de modeler des portraits à l’argile en s’inspirant de sa fille qui, amoureuse d’un homme en partance pour l’étranger, dessina l’ombre de son visage projetée sur un mur, à la lumière de la bougie. Vivian Maier revisite cette idée de la trace ».


Self-portrait, New York, NY, May 5, 1955

© Estate of Vivian Maier, Courtesy of Maloof Collection and Howard Greenberg Gallery, NY

© Estate of Vivian Maier, Courtesy of
Maloof Collection and Howard Greenberg
Gallery, NY

« À l’opposé du jeu d’ombre, Vivian Maier dévoile aussi ses traits à l’image. On reconnaît régulièrement son visage dans des miroirs. Mais l’entreprise n’est pas du tout narcissique. L’Américaine est plutôt dans le registre du jeu. Elle s’amuse avec sa physionomie, presque comme une petite fille. On remarque son rapport à l’espace, au reflet et le rond qui peut rappeler l’obturateur de son appareil photo. Cependant, sans témoignage de sa part, on ne peut émettre que des suppositions. On sait qu’elle prenait environ 150 photos par an, mais qu’elle n’avait sans doute pas l’intention de faire oeuvre ».

Marine Durand / Photo : © Estate of Vivian Maier, Courtesy of Maloof Collection and Howard Greenberg Gallery, NY
Informations
Bruxelles, Bozar

Site internet : http://www.bozar.be/

du mardi au dimanche, de 10:00 à 18:00, et le jeudi jusqu'à 21:00 (sauf pendant les vacances d'été).

08.06.2022>21.07.2022mer > dim : 10h-18h, 10> 2€ (gratuit -6 ans)
Articles similaires
Animal (186), 2011 © Elliot Ross

Auguste Rodin, Grosse Femme accroupie à masque d’Iris, vers 1910
Bronze, fonte Alexis Rudier, 1911 © Londres, Victoria and Albert Museum