Home Exposition Louis de Funès

Farce majeure

© Philippe Petitjean

C’est un monument de l’humour qui prend ses quartiers à Bruxelles. Le cinéma Le Palace, ouvert en 2018 dans un magnifique bâtiment Art déco, consacre sa première exposition à l’immense Louis de Funès. Produite par la Cinémathèque de Paris, celle-ci retrace en 150 pièces le parcours du plus cartoonesque des acteurs français. Ces extraits de films, costumes, objets personnels ou documents d’archives rendent hommage au génie burlesque, décortiquant ses mimiques ou méthodes de travail – car le rire, c’est sérieux !

Acteur comique parmi les plus populaires de l’Hexagone, mais boudé par la critique, Louis Germain David de Funès de Galarza fut bien plus qu’une simple machine à grimaces – d’ailleurs, il abhorrait ce terme. La gesticulante vedette française (et la mieux payée !) demeurait avant tout un bourreau de travail, comme le montre la première des cinq parties de ce parcours. « Nous voulions d’abord montrer son abnégation, explique Eric Franssen, le directeur du Palace. Il a rencontré le succès tardivement, à 50 ans, exerçant moult petits boulots avant de percer ». Ce comédien autodidacte a en effet gagné sa vie comme comptable, fourreur ou pianiste d’ambiance dans des bars ou cabarets avant d’obtenir son premier rôle dans La Tentation de Barbizon, en 1945, dans lequel il campait… un portier.

Purée !

Orfèvre du gag apte à dérider toutes les générations, le trublion d’un mètre soixante-trois s’inscrit très vite dans les pas de Charlie Chaplin, Buster Keaton ou Laurel et Hardy (« les plus grands », disait-il). Comme eux, « il n’a jamais cesser d’affiner son jeu, cherchant sans relâche le rythme juste ». En témoigne cette scène mythique du Grand restaurant (Jacques Besnard, 1966) où on le voit peu à peu se transformer en Adolf Hitler grâce à un astucieux jeu d’ombres avec le lustre, pour scander en allemand la recette du soufflé à la pomme de terre – « Butter. Salz und… Und ? Muskatnuss! Muskatnuss, Herr Muller ! ».

L’antipathique

La deuxième section est évidement consacrée à sa collaboration avec Gérard Oury qui l’a dirigé dans La Grande vadrouille, Les Aventures de Rabbi Jacob (dont on découvre ici la barbe originale) ou La Folie des grandeurs, entre autres cartons Ces films vont alors imposer un archétype : celui du râleur, du bougon, de l’avare. Bref, du type pas forcément agréable. « C’est là tout son génie : il a créé un personnage totalement imbuvable mais auquel on ne peut que s’attacher », analyse Eric Franssen. Cet homme de droite, catholique et profondément conservateur n’a peut-être pas bousculé plus que ça sa nature…

Cruchot, au rapport !

Après s’être bidonné devant un écran tactile compilant les émotions jouées par “Fufu” (“colérique”, “modeste”, “exaspéré”…« là on dirait Sarkozy, non ? »), on s’attarde sur la série des gendarmes et l’inoubliable Cruchot. Pas franchement des chefs-d’oeuvre du septième art, mais profondément inscrits dans la mémoire collective et les coeurs. Pourquoi ? « Peut-être parce que ces films évoquent une période de bonheur jamais retrouvée pour les Français, celle des Trente glorieuses. De Funès avait aussi compris les bouleversements de son époque, comme Mai-68, pour mieux s’en amuser et réconcilier les générations ». Une petite madeleine de Proust pour la route, ma biche ?

Julien Damien // Photo : © Philippe Petitjean &
Informations
Bruxelles, Le Palace
02.10.2021>16.01.2022lun, mar, jeu & dim : 11h-18h mer, ven & sam : 11h-19h, 10 > 7€ (gratuit -6 ans)
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