Home Exposition Eugène Dodeigne

L’illustre inconnu

Eugène Dodeigne dans son atelier, 1958 Archives Dodeigne

Ouverture reportée

D’Eugène Dodeigne, on connaît les sculptures monumentales en pierre bleue de Soignies. Ses œuvres demeurent familières des habitants des Hauts-de-France, jalonnant les espaces publics, parcs et écoles, de Lille à Landrecies, en passant par Marcq-en-Barœul – où l’on trouve son chef-d’œuvre : Le Groupe des dix. Pourtant, ce Français né en Belgique avait plus d’une corde à son arc. Cette rétrospective rend hommage à un artiste aussi habile avec le bois, le bronze, la peinture ou le fusain.

À Dodeigne, qui lui avait ouvert les portes de sa maison de Bondues, Germain Hirselj fit une promesse : « révéler un jour son œuvre dans toute sa diversité ». Cinq ans après sa disparition, l’engagement est aujourd’hui honoré. L’historien de l’art dévoile à la Piscine le fruit d’une décennie de travail. Cette rétrospective serait « la plus importante jamais consacrée » au Nordiste. Chrono-thématique, l’exposition rassemble 185 œuvres de cet éminent membre du groupe de Roubaix (avec ses amis Germaine Richier ou Eugène Leroy). Surtout, il s’agit de « faire découvrir cet artiste à ceux qui ne le connaissent pas, ou pensent le connaître ».

(c) A. Leprince – Ville de Roubaix

(c) A. Leprince – Ville de Roubaix

Taille XXL

Eugène Dodeigne est né en 1923 près de Liège (où il ne vécut que six mois) dans une famille de tailleurs de pierre. Il fut initié au métier dès l’âge de 13 ans par son père, lequel sculptait des monuments funéraires. Voulant faire de son garçon un ouvrier qua- lifié, il l’envoie aux Beaux-Arts de Tourcoing. Très vite, ses professeurs remarquent ses talents. Le jeune Eugène gagne Paris, où il découvre le Musée de l’Homme. « Ce sera son Louvre ». Comme Henry Moore ou Giacometti, Dodeigne se passionne pour les arts primitifs, sa première influence. « On a l’impression que ses œuvres plantées dans l’espace public existent depuis une éternité, remarque Germain Hirselj. Comme si elles avaient été façonnées par de lointains ancêtres ». Bien sûr, c’est d’abord ce travail sur la pierre de Soignies (« granitique, donc très dure ») qui assurera sa renommée. De cette roche bleutée, il élèvera des formes épurées d’où transpirent « une force, une brutalité parfois, mais une indéniable sensualité ».

Les Trois Branches, 1954, Coll. ML. Photos : A. Leprince – Ville de Roubaix

Les Trois Branches, 1954, Coll. ML. Photos : A. Leprince – Ville de Roubaix

L’artisan

Dodeigne cherche à saisir la figure humaine et son mouvement. Il passa ainsi de nombreuses heures à observer les danseurs du ballet du Nord. Parmi les œuvres présentées à Roubaix, on trouve ses croquis préparatoires, de grands fusains, et surtout ses peintures, trop méconnues. Tout aussi étonnantes, ses sculptures sur bois comme Les Trois branches, lorgnant vers l’abstraction. « Pourtant c’est bien un corps, avec ses épaules tombantes ». Citons également ses bronzes (ce sublime Mains levées) encore ignorés et… qu’il coulait seul. « Dodeigne est le modèle parfait de l’artiste artisan. Il avait son propre four dans son atelier, faisait tout lui-même. Il a d’ailleurs bâti ses deux maisons de ses mains ». La Piscine lui en élève ici une troisième, certes plus éphémère, mais qui fera date.

Roger Catherineau (1925-1962) Dodeigne dans le jardin de la maison des Bois blancs, v. 1954 Archives Dodeigne

Roger Catherineau (1925-1962) Dodeigne dans le jardin de la maison des Bois blancs, v. 1954 Archives Dodeigne

Julien Damien
Informations
Roubaix, La Piscine
06.11.2020>06.02.2021mar > jeu : 11 h - 18 h • ven : 11 h - 20 h sam & dim : 13 h - 18 h, 11 / 9 € (gratuit -18 ans)
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