Home Théâtre & Danse Le Cabaret de Madame Arthur

Queer véritable

BRENDA MOUR MADAME ARTHUR (c) Bruno Gasperini

Dans l’antre de Madame Arthur, la chanson française s’encanaille. Les divas portent la barbe avec panache, et la fantaisie seule fait loi. Installé depuis 70 ans à Pigalle, le célèbre cabaret transformiste pose ses valises pleines de strass et de plumes à Arras, le temps d’un show burlesque qui rebat les cartes de l’identité.

Elle surgit du lourd rideau de velours, tailleur pied-de-poule, casque colonial et paupières pailletées de bleu. Se plante derrière le micro, entonne naïvement le tube le plus désuet de Michel Delpech – « Il était cinq heures du matin / On avançait dans les marais / Couverts de brume » – avant de brandir un fusil de chasse et de ponctuer d’une détonation jouissive les différents couplets ! Chaque week-end chez Madame Arthur, “Corrine”, Sébastien Vion à la ville, aime surprendre son public. Qui le lui rend bien, depuis la réouverture de cette salle mythique de l’après guerre en 2015.

Bon chic bon genre

C’est le cabarettiste aguerri Jérôme Marin alias Monsieur K, avec l’équipe de la boîte de nuit parisienne Le Divan du Monde, qui a mis sur pied ce spectacle plus « hystérique qu’historique ». En une heure, ses « créatures chimériques », Corrine donc, mais aussi Tony Blanquette, Patachtouille ou Charly Voodoo, y incarnent une douzaine de personnages sensuels, drôles et extravagants. Et se jouent avec une liberté folle des frontières de genre. « On fait jaillir quelque chose de l’ordre de la réflexion sur le masculin et le féminin », indique le directeur artistique, sans pour autant se prendre trop au sérieux.

French Touch

Enfiler une perruque, appliquer des faux-cils, se glisser dans un corset, « c’est partir en vacances de soi-même », explique Brenda Mour. Assister à leur show, c’est aussi découvrir tout le répertoire français de la Belle Époque à aujourd’hui, un peu revisité. Et si les chansons de Mistinguett, Mylène Farmer ou des Rita Mitsouko s’enchaînent dans un fastueux étalage de coiffes et de costumes, il ne s’agit pas simplement de transformisme. Pianiste formé au conservatoire, chanteur d’opéra, accordéoniste… les meneuses de revues, sous couvert de plaisanteries grivoises, affichent une longue carrière d’artistes derrière elles. Qui de la bourgeoise coincée se dévergondant sur Antisocial ou de la ballerine emplumée singeant Zizi Jeanmaire répondra présente au Tandem ? Madame Arthur préfère rester discrète, les tableaux évoluant chaque semaine. Corrine, elle, est repartie en chasse : pardessus l’étang, on aurait vu passer des oies sauvages…

Marine Durand
Informations
Arras, Théâtre d'Arras

Site internet : http://www.tandem-arrasdouai.eu

08.10.202020 h 30, 22/12€
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