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De nuit et de fureur

Difficile de trouver titre plus ambitieux. Et pourtant L’Epoque ne se veut pas un film-somme, porté par un regard surplombant. D’une caméra aussi agile qu’attentive, il saisit plutôt des flux : de paroles, de pensées, d’énergie. Avec la jeunesse comme vigie, le présent se révèle dans toutes ses contradictions.

Entamé après les attentats de janvier 2015, le tournage de L’Epoque s’est achevé avec les élections présidentielles de 2017. Davantage qu’une chronique de la vie publique française, sagement scandée par des dates et évènements, le premier long-métrage de Matthieu Bareyre chemine au gré des rencontres. Des corps surgissent et s’emparent de l’espace offert par le cinéaste pour dire enfin ce qui les traverse. Quelques figures se dessinent, portées par la joie ou la colère. Tout la beauté du film est là : ne pas hiérarchiser les affects ou les actes, mais les accueillir avec une égale curiosité. Car l’époque, pour Bareyre, se révèle dans les chants et les cris, les manifestations et la danse, la violence et la tendresse. C’est ce qu’incarne avec une inventivité inouïe Rose, jeune femme rencontrée sur la Place de la République au début de Nuit debout. Ni séparées ni confondues, la fête et la politique deviennent avec elle les pôles d’une vie qui n’est plus mutilée par le pouvoir, les normes, les désirs factices. En cousant les nuits les unes aux autres, sans se soucier du point du jour, L’Epoque donne à respirer l’air du temps comme rarement. Ici, le fond de l’air est Rose.

Raphaël Nieuwjaer

Documentaire de Matthieu Bareyre, sortie le 17.04


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