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Corps à Corps

Lara, 15 ans, voudrait devenir danseuse étoile. Elle est aussi une jeune fille née dans un corps de garçon. Caméra d’or au dernier festival de Cannes, Girl échappe avec délicatesse aux pièges de son sujet pour faire le portrait nuancé d’une adolescente sous tension.

Pour son premier long-métrage, le Gantois Lukas Dhont ne s’est pas simplifié la vie. Pendant un moment, le spectateur redoute d’assister à des scènes trop ordinaires de crises et d’humiliations publiques subies par bien des transsexuel(le)s. Ici, la famille de Lara est aimante, les médecins attentifs et ses camarades de classe compréhensifs. Toute l’intelligence de Girl est là : tout va bien, mais tout pourrait craquer. En se tenant sur cette ligne de crête constamment menacée de s’ébrécher, le film rend d’autant plus sensible la précarité physique et affective dans laquelle se trouve le personnage principal. On comprend en effet à quel point sa vie est suspendue au regard d’autrui. Et c’est bientôt le nôtre qu’on interroge. Dhont suscite ainsi une empathie jamais mièvre. Difficile de ne pas être troublé par ce corps si manifestement masculin, mais tellement féminin. Notons que le récit finit par s’emballer, cédant à la tentation du coup de force. Le cinéaste ne tient-il pas la note jusqu’au bout ? Ce qu’il accomplit demeure pourtant précieux. En filmant le corps de Lara dans son élan et sa retenue, il ne focalise pas tant sur une identité que sur l’énergie alentour.

Raphaël Nieuwjaer
De Lukas Dhont, avec Victor Polster, Arieh Worthalter, Valentijn Dhaenens… Sortie le 10.10

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