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Punir sans entraves

Mai 68, la Belle Ouvrage, de Jean-Luc Magneron @ WIDE

On se souvient du sourire narquois de Cohn-Bendit face à un CRS. On se souvient aussi des voitures en feu et des jets de pavés… Inédit en salles, Mai 68, la belle ouvrage, dénonce avec force la répression du mouvement ouvrier et étudiant.

Interviewé en juin 1968, le général de Gaulle se félicitait du travail des forces de l’ordre durant les événements de mai. Aucun mort n’était à déplorer et le nombre de blessés fut limité. Successeur de Maurice Papon, le préfet de police Maurice Grimaud avait d’ailleurs eu des mots forts : « Frapper un manifestant tombé à terre, c’est se frapper soi-même en apparaissant sous un jour qui atteint toute la fonction policière ». Vue du Quartier latin, la situation aura pourtant semblé bien différente. Humiliations, menaces, passages à tabac, usages illégaux de certaines armes : c’est d’une violence systématique dont témoignent les étudiants, riverains, médecins et journalistes interrogés par Jean-Luc Magneron.

Politique du bâton

Tourné à chaud, Mai 68, la belle ouvrage, a l’ambition d’instruire le procès de l’état. Un étudiant évoque une « démocratisation du coup de matraque » pour décrire ce qui se passait dans les commissariats. En vérité, le traitement était pire pour les étrangers et les femmes. De parole en parole, Paris apparaît comme une ville assiégée où rôdent des spectres infamants. Ainsi de ce camp improvisé où, ceinturés par les barbelés et les projecteurs, les détenus se trouvaient entassés. à l’heure où des tanks sont envoyés à Notre-Damedes- Landes pour déloger une poignée de Zadistes, Mai 68 se révèle comme une étape-clé dans la criminalisation des luttes politiques et la militarisation de l’espace public.

Raphaël Nieuwjaer

Documentaire de Jean-Luc Magneron. En salle

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