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L’envol

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Drôles d’oiseaux est un drôle de film. Et, ce qui ne gâche rien, un film drôle. à travers ce second long-métrage, Elise Girard marie les contraires avec une étonnante gracilité : l’amour impossible et la fantaisie, le poids du passé et les fulgurances du présent.

Mavie voudrait écrire. Peut-être même devenir écrivaine. Mais comment se concentrer quand le couple qui vous héberge exprime bruyamment son plaisir, et que dans la rue les goélands « tombent comme des mouches » ? Il lui faut trouver une chambre, une « chambre à soi » comme le disait jadis Virginia Woolf. Celle-ci lui sera prêtée par Georges, vieil homme aussi séduisant qu’atrabilaire. En échange, il lui suffit de travailler quelques heures dans sa librairie. La tâche n’est pas trop difficile : Georges éconduit tous les égarés qui ont le malheur d’entrer dans sa boutique. « Plus personne ne lit… », regrette-t-il amèrement. Un humour pince-sans-rire, douloureux parfois, baigne ainsi le film. Ce qui pourrait alors se transformer en aigreur est sauvé par l’amour qui se noue entre Mavie et Georges. Amour tendre, qui n’est peut-être d’ailleurs qu’un fantasme. Mais celui-ci permet à la jeune femme de prendre la plume, d’inventer un monde. En ce sens, Drôles d’oiseaux raconte l’éclosion d’une vocation. Et le passage de témoin entre deux générations, l’une qui se sera consacrée vainement à la lutte politique, l’autre qui tente de se trouver grâce à l’art. Qu’une entente puisse exister entre les deux, voilà ce qui rend le film si touchant.

Raphaël Nieuwjaer

De Elise Girard, avec Jean Sorel, Lolita Chammah, Pascal Cervo… En salle


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