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La métamorphose

Sorti de nulle part, Moonlight a conquis les festivals du monde entier avant de triompher aux Golden Globes (meilleur film dramatique). Un Oscar semble même possible. Le deuxième long-métrage de Barry Jenkins mérite-t-il vraiment sa réputation ?

D’emblée, Moonlight cherche à en imposer. La musique est puissante, la caméra virevolte comme une toupie. Le spectateur pourrait se sentir emporté, ou agacé. Certes, en racontant la vie de Chiron en trois chapitres, depuis l’enfance jusqu’à l’âge adulte en passant par l’adolescence, Jenkins a décidé de ne pas faire simple. Cette façon de rouler des mécaniques rencontre cependant la trajectoire de son personnage. Il est question d’un homme issu de la rue, noir et homosexuel, viril et vulnérable, essayant de s’affirmer dans un monde violent. Moonlight est d’abord l’histoire d’une métamorphose, ou comment un gringalet martyrisé est contraint de devenir une montagne de muscles. Né dans un quartier défavorisé de Miami, Chiron a une vie difficile. Sa mère se drogue, son père est absent. Puis un jour il rencontre Juan. Loin des clichés, il n’est pas sauvé par une assistante sociale, mais par un dealer. Un homme d’une douceur infinie, le seul capable de laisser s’épanouir l’enfant. Car Moonlight est aussi le récit d’une sensibilité qui ne se résout pas à disparaître derrière une silhouette. Barry Jenkins lui donne chair, grâce à ses trois acteurs (la mine butée d’Alex Hibbert, la démarche dégingandée d’Ashton Sanders, le sourire retenu de Trevante Rhodes). En ce sens, c’est une réussite.

Raphaël Nieuwjaer

De Barry Jenkins, avec Alex R. Hibbert, Trevante Rhodes, Ashton Sanders… Sortie le 01.02

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