Indices d’Orient

Qu’on ne s’y trompe pas : il ne s’agit pas là d’un voyage. « Plutôt de découvrir des récits d’expérience », indique Pascale Pronnier, directrice artistique du Fresnoy dont sont issus ces 13 créateurs. « Ceux-ci nous parlent de politique, d’actualité… mais toujours à travers une histoire intime » complète Yannick Courbès, conservateur-adjoint du MUba. Très diversifié, en terme de sujets ou de techniques, le parcours s’ouvre sur une œuvre de l’Anglaise Hannah Collins, nous montrant l’intérieur en friche de l’usine désaffectée de La Tossée – fleuron de l’industrie textile à Tourcoing, fermé en 2004. Assis sur un siège en face de la vidéo, le spectateur écoute en parallèle les rêves formulés par des Roubaisiens d’origine algérienne (tandis que l’un boit du thé au milieu du désert, un autre s’imagine président de la République…) Voilà donc un regard à rebours de toute nostalgie ou misérabilisme, nous prouvant que l’Homme et ses songes demeurent,  bien au-delà de son outil de travail.

Vol de nuit

Tout aussi poétique, Natural process Activation # 3 Bloom, du Franco-Marocain Hicham Berrada, nous dévoile l’éclosion d’un pissenlit accélérée artificiellement grâce à une lampe à Tungstène, laissant le champ libre aux interprétations (Pascale Pronnier y voit ainsi « une métaphore des printemps arabes », selon). Plus politique : Tehran-Geles offre un survol nocturne au-dessus de Los Angeles. Ces images de mégalopole futuriste d’Arash Nassiri sont truffées de messages publicitaires en persan. L’artiste imagine ainsi « ce qu’aurait pu devenir Téhéran si l’américanisation des années 1970 s’était poursuivie ». Plus loin, Buffer Zone (« mémoire tampon », en langage informatique) du Syrien Samer Najari, expose des tranches de vies de réfugiés, saisies entre Calais et Douvres en… 2003. Des histoires dont les traces subsistent brièvement « pour ensuite s’effacer à jamais… » selon l’artiste. Celles-ci demeurent pourtant – hélas – terriblement d’actualité.