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Le caméléon

Le label Domino Records accueille depuis peu LA Priest (aka Sam Dust). Loin d’être un novice, ce Britannique a squatté la une des revues musicales en 2008, avec trois camarades, sous la bannière de Late Of the Pier. Il revient aujourd’hui avec un projet solo diablement convaincant. Au carrefour de pistes multiples – electro, funk, prog-rock – ce fan d’Aphex Twin ne s’impose aucune règle. Il façonne et assemble des sonorités hybrides délivrant des morceaux novateurs emplis d’un groove fulgurant. Rencontre avec le créateur d’une oeuvre kaléidoscopique.

 

Tout a-t-il commencé avec le groupe Late Of the Pier ?

Non, bien avant. Je m’intéresse à la musique quasiment depuis que je sais marcher ! Mes parents avaient chacun leur groupe et je les observais. J’attrapais leurs instruments et les manipulais. J’imitais aussi les popstars qui passaient dans The Chart Show, comme Björk ou ce bon vieux Peter Gabriel.

Comment décririez-vous votre musique ?

C’est une des choses les plus difficiles à faire ! Lorsque je joue un morceau, il peut prendre une forme différente du jour au lendemain. C’est une musique caméléon, qui se transforme continuellement. Et dans laquelle on perçoit un paquet de références… Chacun de mes morceaux, quel qu’il soit, combine diverses influences. Je pioche dans tous les styles et tous les horizons géographiques. Je n’ai aucune barrière.

On pense aussi à Aphex Twin ou à Prince à l’écoute de votre
album…

J’aime beaucoup ces deux artistes. Cela doit venir de leur intégrité. On ne compose pas de la musique seulement pour faire plaisir aux autres. On s’épanouit vraiment lorsqu’on fait ce qu’on veut. Il faut prendre des risques, rester ferme sur ses positions et être sûr que votre travail vous satisfait. Pour Aphex Twin, cela a particulièrement bien fonctionné.

Erol Alkan a-t-il aussi compté pour vous ?

Erol est un génie. C’est l’un des musiciens les plus talentueux avec lesquels j’ai travaillé. Ces dernières années j’ai aussi collaboré avec des artistes émergents, mais en définitive je compose plutôt seul.

Du coup, ce nouvel album répond-il à vos attentes ?

Je n’avais pas vraiment d’idée au départ, mais le résultat final me
plaît. J’ai cherché à lui donner du relief, de la profondeur, en superposant
et mélangeant plusieurs sonorités et idées dans un seul morceau.

Pourquoi êtes-vous allé au Groenland pour réaliser cet album ?

Après de longs mois enfermé à cause de l’enregistrement j’avais besoin de faire une pause. J’ai alors rejoint un ami qui travaillait sur place. Mais, une fois là-bas, j’ai rencontré une bande de mecs qui m’ont conseillé de me rendre dans une ville minière du coin, réputée pour ses phénomènes musicaux étranges.

C’est-à-dire…

Il y avait là plein d’interférences qui donnaient aux sons un côté surnaturel. Réutilisées dans mes morceaux, celles-ci créent des sonorités festives assez bizarroïdes. La plupart des musiciens en auraient sûrement tiré des compositions plus sensibles, en harmonie avec le paysage. D’ailleurs, si j’y retournais, je réaliserais peut-être quelque chose de plus sérieux.

A quoi peut-on s’attendre sur scène ?

Sachant que je me produis seul, on me demande comment je parviens à combiner tant de variations. En concert je crée un système dans lequel tous mes instruments sont enchaînés, formant un set étrange. Les séquences s’éparpillent mais je peux les contrôler. Sur scène, je veux montrer les rouages de mes compositions en remontant jusqu’à l’origine des sons. En plus, j’exécute des loopings imprévisibles avec ma voix. Je trouve que ma musique, sur CD, reste trop figée.

Avezvous définitivement arrêté Late of the Pier ?En France, vous aviez connu un certain succès…

C’est drôle parce que les gens ont l’impression que nous nous sommes séparés, alors que je n’ai pas le sentiment d’avoir quitté le groupe. Je vois chaque membre presque tous les jours et nos rapports n’ont pas changé. Nous menons chacun des projets personnels et ça nous semble naturel.

Quels sont vos projets ?

J’aimerais continuer à faire « dialoguer » la musique avec le public. Mes créations sont faites pour être interprétées en live. La prochaine étape serait d’improviser, en direct. Les gens pourraient entendre de nouveaux morceaux à chaque concert. Je veux continuer d’expérimenter.

Propos recueillis par Amélie Comby

A écouter / Inji, (Domino Records), Sortie le 29.06.

A voir / 18.07, Dour, Plaine de la machine à feu, pass 1 jour : 50€, pass 5 jours : 120€, www.dourfestival.eu

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