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Indomptable Angélique

Angélique est entraîneuse dans un cabaret, situé à cheval entre la Lorraine et l’Allemagne. Une ancienne diva locale dont l’ostensible fard à paupières et la demi-tonne de breloques ne suffisent plus à retenir le temps. Quand Michel, l’un de ses habitués, lui demande sa main, elle se dit qu’il serait peut-être temps de changer de vie. La voir «fixée» comblerait ses enfants, pour qui elle n’a jamais été une mère… mais en a-t-elle vraiment envie ?

– POUR –

« Sauvage», «généreux» et « mal élevé ». Les mots de Nicole Garcia, qui accompagnaient la remise du prix de la caméra d’or à Cannes, ont fait la réputation de Party Girl. A juste titre. Le trio Amachoukeli-Theis-Burger signe un film irrévérencieux, interrogeant les conventions et le libre-arbitre avec une poésie brute (cinéma d’immersion) et criante de réalisme. Pour cause, la quasi totalité des acteurs sont non-professionnels. Ils jouent leur propre histoire. Celle d’Angélique Litzenburger, sexagénaire dans une crise existentielle à retardement, aussi pimbêche qu’attachante, et surtout indéfectiblement libre. Sans jamais tomber dans le panneau des « dessous glauques de la nuit », les réalisateurs portent à l’écran un singulier destin, à la fois sombre et haut en couleurs, qui nous surprend par sa force de vie, « fragile mais pas encore morte », ça aurait pu être l’hymne d’Angélique. On ressort revigoré, convaincu que, de la laideur d’une ville dévastée comme Forbach (où est tourné le film), a jailli quelque-chose de solaire. De beau. Clémence Rolin

– CONTRE –

Si le réalisme était seul gage de qualité, cela se saurait. Certes l’ambition des trois jeunes réalisateurs de Party girl pourrait rappeler celle de Felix Van Groeningen (la Merditude des choses), ou des frères Dardenne. A ceci près que ces derniers atteignent leur but. Party girl en est incapable car ses auteurs veulent tout à la fois : montrer le vrai, faire du beau avec du laid, et bouleverser le spectateur (façon les Petits Mouchoirs). Le film, original car transgenre, s’en trouve bancal et opaque, perdant le spectateur dans un entre-deux désagréable. Derrière un naturalisme qui frise le regard documentaire (caméra à l’épaule, gros plans sur les visages marqués, mal maquillés), les bons élèves déploient une esthétique léchée, des moments de poésie façon la Guerre est déclarée (jeux de lumière, contre-jours, filtres de couleur) rythmés par une bande son émouvante. C’est cette prétention formelle qui empêche de croire à Party Girl, pourtant prometteur, car ne cédant pas aux clichés du genre (ni mac violent, ni femme battue, ni viols…). Et si son sujet fait preuve d’audace, celle-ci ne parvient pas à sauver Party girl. A la limite, on aurait préféré un documentaire sur Angélique seule, histoire de creuser le sujet de manière sobre et intelligente. Mais pas cette effusion de sentiments dont le seul mérite serait son caractère « mal élevé » ou son réalisme « irrévérencieux ».  Isabel Amossé

Clémence Rolin & Isabel Amossé

> De Maria Amachoukeli, Samuel Theis et Claire Burger, avec Angélique Litzenburger, Séverine Litzenburger, Mario Theis, Joseph Bour … En salle.

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