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Silence, Saturne !

de David Cronenberg
© Daniel McFadden

Le territoire a déjà été foulé, arpenté, quadrillé. Du Sunset Boulevard de Wilder (1950) au Mulholland Drive de Lynch (2001), le cinéma américain a largement montré l’envers cauchemardesque de l’usine à rêves. Pour se démarquer, Cronenberg semble d’abord devoir forcer le trait : l’acteur en désintox a 13 ans, la folie perce à chaque réplique, l’inceste et la mort sont partout. Hélas, son humour pince-sans-rire et son style clinique s’accommodent mal du grotesque. Comme pour Cosmopolis, il faut donc surmonter une certaine ingratitude du film pour en saisir quelques éclats de beauté. Et ces éclats sont d’un noir absolu. Actrice sur le retour désirant à tout prix rejouer un rôle jadis tenu par sa mère ; ado-star aussi tyrannique que perdu, sœur pyromane et papa psy-gourou marié à… sa sœur. La barque serait bien chargée si Cronenberg ne touchait là à l’essence de son cinéma. La chair devient folle, elle bégaie. C’est le côté saturnien du film : les enfants se tuent à reproduire la vie de parents qui les dévorent. Pour Cronenberg, cette chair folle est peut-être aussi celle d’un Hollywood où l’on ne tourne plus que des remakes, des sequels et des prequels. Bref, des œuvres dérivées. Imparfait, sans doute, son film a au moins le mérite d’être singulier.

 

Raphaël Nieuwjaer

Avec Julianne Moore, Mia Wasikowska, Robert Pattinson

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