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Jacques Rancière

Éd. La Fabrique
Le fil perdu, essai sur la fiction moderne

Pour Aristote, le récit fictionnel est un enchainement d’actions vraisemblables et s’inscrivant dans une forme de logique faisant nécessité. Ce principe est longtemps resté indiscutable, fondant notamment les grandes lignes de la critique littéraire. Aussi, lorsque Flaubert ou Conrad décident de briser cet axiome et de rendre à la fiction toute l’imprévisibilité et le désordre de l’existence, quelque chose de profondément nouveau se produit. Ce sont ces questions, ces péripéties, voire ces retournements de situations qu’analyse ici Jacques Rancière. Où il est notamment question d’un baromètre, dans Madame Bovary (1856), qui ne fonctionne pas et dont l’utilité narrative peut, à l’époque, sembler extrêmement discutable ; cette incongruité fictionnelle détourne le récit de sa fonction première (raconter des faits et des états) pour l’amener vers un ailleurs, vers la vie et sa partielle absence de logique. Vers une singularité détachée des conventions. L’ancien élève d’Althusser discute également les principes modernes de la critique : Barthes, Lukacs et Benjamin sont convoqués, discutés et parfois remués, l’ensemble constituant finalement un essai moderne sur la fiction – et l’inverse. Stimulant.

Sylvain Coatleven

152p., 14€.

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