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Gaze is a Gap is a Ghost

© Jean Luc Tanghe

Originaire de Seattle, Daniel Linehan, 30 ans, s’est installé en Europe pour suivre la formation de P.A.R.T.S., l’école créée à Bruxelles par Anne Teresa De Keersmaeker. Son premier solo (not about everything, 2008) le révèle. À l’occasion d’une résidence à l’Opéra de Lille, le jeune prodige revient sur sa dernière création,Gaze is a Gap is a Ghost, et évoque son rapport à la technologie. Rencontre avec l’un des chorégraphes les plus insaisissables de sa génération.

Comment définiriez-vous votre travail ? C’est difficile car il mélange beaucoup de matière, de moyens. Disons que j’essaie toujours d’introduire l’idée de relation entre deux éléments. Par exemple, les liens entretenus par le corps en mouvement sur scène et la technologie. Je ne crée pas d’effets spéciaux, mais je mets cette technologie en scène ; une vidéo, de la musique, tout ceci crée la structure du spectacle. Au danseur de s’adapter. Et comme l’humain ne peut être parfait, ce contraste met en lumière l’importance de la performance live, la vie de la pièce.

Quel est le sujet de votre dernière création,Gaze is a Gap is a Ghost ? J’explore le rapport entre le visible (le danseur et la vidéo), et l’invisible (les différents niveaux narratifs et émotionnels). Les danseurs portent une caméra subjective dont l’image est projetée sur le rideau. Ainsi, le spectateur voit presque la même chose que l’interprète. Même s’il lui manque des détails, sans cet apport technologique, le public n’aurait jamais eu accès à cette vision.

Que révèle ce procédé de caméra embarquée ? Il souligne que regarder à travers autrui est vain, car voir ou identifier le mouvement ne signifie pas être en mouvement. Cette relation entre ce que l’on observe et ce que l’on ressent me captive. En créant des réalités simultanées,je veux mettre en exergue différents points de vue, montrer que celui du danseur et celui du spectateur ne correspondent pas à la vidéo diffusée. Ce paradoxe s’applique également au dramaturge : il a beau mettre en scène la pièce avec beaucoup du recul, il obtiendra forcément de la part du danseur un autre regard sur la création.

La vidéo ne devient-elle pas un personnage à part entière ? Oui, la vidéo devient un objet physique sur scène, le danseur peut jouer avec. En passant derrière et devant, en traversant l ‘écran, sorte de rideau translucide composé de bandes de tissu. Sous cet angle, cette chorégraphie s’approche de la performance.

Qu’attendez-vous de votre résidence à l’Opéra de Lille ? J’en suis déjà très heureux ! Ne possédant pas de studio, j’ai besoin de ces espaces de création et de soutien. Je vais donc régulièrement présenter mon travail à Lille et, surtout, développer une relation avec le public. Notamment via une collaboration avec le LaM ou encore l’organisation d’un atelier avec des chômeurs. Passer de structures accueillant 300 personnes à l’Opéra est un véritable challenge, c’est à la fois angoissant et très excitant !

Quel rapport entretenez-vous avec les publics belges et français ? Partout, mon travail a été bien accueilli,mais c’est en France et en Belgique que j’ai le plus tourné. Le public européen est très réceptif, très observateur.

Peut-être apportez-vous une plus grande attention aux détails ? Mes pièces demandent un certain effort. Gaze is a Gap is A Ghost, par exemple, nécessite de porter régulièrement son regard du devant à l’arrière de la scène. Or, le public européen est prêt à fournir cet effort.

Elsa Fortant
Informations
Lille, Opéra

Site internet : http://www.opera-lille.fr

10.06.2013>11.06.201320h, 22/17/13/8/5 €, www.latitudescontemporaines.com

Daniel Linehan, Gaze is a Gap is a Ghost – Trailer

” Voir et identifier le mouvement ne signifie pas être en mouvement “

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